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L'âge pivot, une affaire de cornecul !

7 Janvier 2020 , Rédigé par Christian Eckert

Le Gouvernement a réussi à faire oublier beaucoup d’aspects scabreux de son projet de réforme des retraites en focalisant l’attention sur la seule question du financement qui justifierait selon lui la mise en place d’un OVNI : l’âge pivot. Officiellement, cela ne remet pas en cause l’âge de départ en retraite. Dans les faits, on sera dissuadé de partir avant l’âge pivot vu le niveau de la retraite servie…

 

Le Gouvernement ne donne aucun chiffrage des économies générées par l’âge pivot. De même, il ne fournit aucun chiffrage des autres mesures contenues dans son projet. Pourtant, il répète à l’envie que l’équilibre du système pour des décennies, passe par la mise en place d’un âge pivot qu’il fixe à 64 ans. Ni plus, ni moins…

 

L’âge pivot qui serait le seul garant de l’équilibre financier des retraites est une affaire de cornecul pour plusieurs raisons :

 

  • D’abord parce que le régime général des retraites pourrait déjà être équilibré. Ce Gouvernement a en effet mis fin au principe de compensation par l’Etat des exonérations de cotisations qu’il a imposées à la Sécurité sociale. C’est en parfaite contradiction avec la loi Veil de 1994.

 

  • Ensuite parce qu’il existe des réserves, comme par exemple le Fonds de Réserve des Retraites. Créé par Lionel Jospin, il conserve plus de 30 Milliards d’Euros d’actifs. D’autres réserves existent dans certains régimes, même si le Gouvernement s’est engagé bizarrement à limiter le principe d’universalité aux dépenses et pas aux recettes.

 

  • Surtout parce que la fin du remboursement de la dette sociale est prévue pour 2024. Les recettes de PRES DE 20 MILLIARDS PAR AN qui alimentent la Caisse d’Amortissement de la Dette Sociale (CADES) seront disponibles. Sans aucun impôt nouveau, on disposera de cette marge considérable pour faire face aux besoins tant sur les retraites que pour la santé.

 

  • Enfin, lorsqu’on fait des prévisions au-delà de quelques années, on est à peu près sûr d’avoir à y revenir : la croissance, l’évolution de l’emploi, le changement des conditions démographiques, les aléas de l’évolution des métiers, « l’uberisation » de la société… sont autant d’éléments déterminants pour les équilibres financiers qui ne sauraient être prévus qu’à court terme, et encore !

 

L’idée supplétive - ou pas - d’une conférence des partenaires sociaux statuant sur l’équilibre des retraites peut toujours séduire et être travaillée. Il ne faut pour autant pas redécouvrir l’eau tiède : tous les ans, le Parlement se prononce sur une grande partie des conditions de nos régimes de retraite. Cela n’a d’ailleurs rien de scandaleux dans la mesure où - à la différence de la plupart des autres pays - les dépenses liées aux retraites font partie de la dépense publique.

 

Il ne faut donc pas limiter notre regard sur la réforme à la seule question de l’âge pivot. Rien ne démontre sa nécessité, rien ne prouve qu’une décote, définitive ou temporaire, suite à un départ avant 64 ans, assure à terme un équilibre pérenne.

 

Plus que jamais, la mobilisation reste nécessaire pour éviter le passage en force d’un projet dont l’âge pivot ne doit pas être l’arbre qui cache la forêt. Un compromis arraché sur cette seule question serait dangereux....

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Retraites : une autre réforme est possible

7 Janvier 2020 , Rédigé par Christian Eckert

Ci-dessous la reproduction d'une tribune que "Le Monde" a bien voulu publier :

 

Malgré deux ans de « concertation », dont on peut se demander à quoi elle a bien pu servir au vu du gâchis actuel, le projet de réforme des retraites présenté par le gouvernement ne rencontre aucun consensus au sein de la société française. Au contraire le grand chamboulement proposé s’est révélé d’autant plus anxiogène qu’aucun chiffrage détaillé de ses effets n’est disponible : aucune des mesures proposées n’est chiffrée, aucun tableau d’équilibre n’est fourni, aucun simulateur précis n’existe.

Le gouvernement a réussi ainsi l’exploit d’accroitre les doutes dans la population quant à la soutenabilité de notre système de retraite au moment même où celui-ci revenait pourtant à l’équilibre et alors que son avenir ne semblait nullement menacé. Et cela d’autant plus que les ressources du Fonds de réserve des retraites (FRR) sont significatives et que l’arrêt prochain de la Caisse d’amortissement de la dette sociale (CADES) va dégager sans prélèvement nouveau des ressources potentielles supplémentaires avoisinant 20 Milliards d’euros par an.

Après déjà les ordonnances travail et le mouvement des gilets jaunes, ce projet a, une fois de plus, plongé le pays dans une crise sociale grave et prolongée. Il a suscité la défiance de la plupart des partenaires sociaux, même les mieux disposés à l’égard du gouvernement. Grâce aux institutions dysfonctionnelles de la 5ème République, le gouvernement pourrait sans doute passer en force et faire adopter sa réforme par une Assemblée nationale aux ordres, mais la sagesse recommande plutôt de retirer ce projet mort-né, avant qu’il ne pollue durablement la vie de la société française.

Pour autant s’en tenir au statu quo serait insatisfaisant au vu des insuffisances du système actuel et certaines des intentions qui ont présidé à ce projet, notamment l’unification progressive du système de retraites, méritent d’être poursuivies. Le sujet de la retraite est toujours sensible mais il semble possible d’avancer dans cette direction de manière plus progressive et moins conflictuelle qu’avec le projet actuel. Il s’agirait tout d’abord d’intégrer l’ensemble des salariés du privé et du public ainsi que les non salariés au sein d’un système unifié de retraite de base en tenant compte comme aujourd’hui des annuités de cotisation pour l’ouverture des droits et en calculant les pensions comme un pourcentage des revenus des meilleures années.

Pour permettre l’intégration du secteur public dans des conditions acceptables à ce régime universel, il conviendrait cependant de réduire fortement la période des 25 meilleures années prise comme référence aujourd’hui dans le secteur privé. Il faudra également indexer les rémunérations passées sur l’évolution des salaires pour le calcul des retraites et faire évoluer ensuite les pensions en fonction de ces mêmes salaires, comme le propose le projet de réforme actuel. 

A côté de ce régime de base unifié, rénové et repensé, on proposerait au secteur public d’élargir le régime de retraites complémentaires obligatoire dont il a commencé à se doter. Il reviendrait bien entendu aux partenaires sociaux du secteur, Etat, collectivités territoriales, employeurs hospitaliers et syndicats de salariés représentatifs, d’en définir les modalités. Cela pourrait consister, à leur choix, soit à intégrer l’Agirc-Arrco dans des conditions à négocier soit à construire un ou des régimes spécifiques pour mieux prendre en compte les particularités du secteur, tout en s’efforçant d’en limiter fortement le nombre.

Au-delà de la seule question des retraites, cette négociation devrait bien sûr porter également sur la revalorisation des rémunérations du secteur public. Après dix années de quasi blocage du point d’indice, les problèmes créés par la sous rémunération des agents publics sont multiples et flagrants. Dans l’enseignement et la santé mais aussi dans de nombreux autres domaines de l’action publique. Des services publics de qualité effectivement présents partout sont indispensables à la cohésion sociale et territoriale du pays, gravement mise à mal ces dernières années. Mais des services publics de qualité sont aussi à la fois un facteur clé de compétitivité économique et un outil indispensable à la formidable transition à mener pour s’adapter au changement climatique et répondre à la crise écologique.      

A côté de cette architecture d’ensemble, plus proche du système actuel, certains éléments de la réforme proposée méritent d’être pris en compte. Cela fait évidemment sens d’unifier et de rationaliser les avantages familiaux et les règles qui prévalent en matière de pensions de reversion, même s’il faudrait sans doute le faire de façon sensiblement différente de celle envisagée par le gouvernement. De même il faut en effet rehausser le niveau de la retraite minimale comme il était prévu déjà de le faire depuis 2003 mais aussi la rendre plus aisément accessible. Il conviendrait également de financer les différents éléments de solidarité du système à travers des moyens séparés et clairement identifiés. 

Mais il faudra aussi faire ce qui n’était pas prévu par le gouvernement actuel : revoir en profondeur les règles qui prévalent en matière de pénibilité. Et cela non seulement pour réparer les dégâts commis de ce fait sur la santé de nombreux salariés mais aussi et surtout pour davantage amener tous les employeurs, publics comme privés, à limiter et prévenir cette pénibilité. Il n’est pas possible en effet de bâtir une réforme des retraites plus équitable sans prendre davantage en compte les différences d’espérance de vie en bonne santé entre les catégories socio professionnelles ni chercher à réduire le risque de désinsertion professionnelle avec l’avance en âge. Cela passe en particulier par la réintégration des quatre critères de pénibilité, prévus par la réforme de 2014 qui avaient été exclus par le gouvernement actuel en 2017 : vibrations mécaniques, port de charges lourdes, postures pénibles et expositions aux risques chimiques. Cela passe aussi par l’abaissement des seuils pour la prise en compte de l’ensemble des dix facteurs de pénibilité, actuellement trop restrictifs par rapport à leurs effets connus sur l’espérance de vie en bonne santé. Les bonifications auxquelles la pénibilité peut donner droit doivent être sensiblement accrues au-delà des deux ans prévus actuellement. Il conviendra enfin non seulement de prendre en compte les expositions connues à ces critères de pénibilité à compter de l’entrée en vigueur de la réforme mais aussi les expositions antérieures selon des modalités à déterminer

Quant au pilotage du système, il ne saurait être centré uniquement sur la part du PIB que le pays consacre aux retraites comme le prévoit le projet du gouvernement, suscitant légitimement le soupçon de vouloir paupériser les seniors dans le futur. Il doit l’être d’abord et surtout sur le niveau de vie relatif que nous voulons garantir aux retraités au cours des prochaines décennies. Il devra bien entendu être accompagné d’une règle d’équilibre financier à tenir sur plusieurs années pour amortir les effets des cycles économiques.

Ces quelques propositions n’ont évidemment pas la prétention de définir à ce stade un projet clef en main mais d’indiquer qu’une autre voie existe, moins anxiogène que celle choisie par le gouvernement actuel, pour avancer vers un système de retraites plus unifié et plus lisible mais aussi plus juste et plus robuste face aux crises économiques à venir. Une voie qu’une véritable négociation devrait cette fois explorer et concrétiser. Il y a urgence en tout cas, sur cette question centrale pour l’avenir du pays, à sortir de l’alternative entre un statu quo insatisfaisant et un projet mal conçu, aux défauts et inconnues multiples.

 

Guillaume Duval, journaliste,

et Christian Eckert, ancien ministre

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...CLIC...SIGNEZ LA PETITION CONTRE LA REFORME MACRON DES RETRAITES

5 Janvier 2020 , Rédigé par Christian Eckert

CLIC... Le parti LREM revendique plus de 400 000 adhérents... CLIC....

Hormis des élus publiquement et opportunément ralliés, autour de moi, dans ma commune, dans mes fréquentations, je n'en connais aucun. Personne ne m'a remis un tract, n'est venu me démarcher, ou n'a organisé un évènement public ou privé avec cette étiquette (ou ce label comme ils disent maintenant...)

Pourtant, j'avais en son temps testé leur système d'adhésion.... CLIC...J'avais, malgré son grand âge (95 ans), fait adhérer ma mère... CLIC...Je lui avais créé une adresse mail... CLIC..., l'avais domicilié avenue du Général de Gaulle (il y en a dans presque toutes les villes) et.... CLIC !.... Sans cotisation, sans signature, sans écrit, ma mère s'était retrouvée en Marche ! Elle ne l'a jamais su...

J'ai donc reçu (à sa place) la communication officielle : les EDL...(éléments de langage)... Je les reçois encore, malgré le décès, voici bientôt deux ans de feu ma mère en Marche... Ils n'ont même pas envoyé un mail de condoléances...

Comme quoi, le fait que seulement 17 000 marcheurs se soient retrouvés votants pour... CLIC... modifier en ligne leurs statuts en dit long sur leur nombre réel, et sur leur fidélité...

Au delà de la raillerie, ce post a un objectif simple : faire un ou deux clics cette fois pour une bonne cause... Demander par une pétition le retrait du projet Macron de réforme des retraites. Il y mille raisons pour ça.

Cliquez sur ce lien pour signer la pétition en ligne.

Il n'y a rien à payer, tout à gagner et cela montrera, au delà des autres actions que chacun peut mener, la force de l'opposition à ce projet dangereux que le Gouvernement s’apprête à passer en force.

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Les macronistes et le Goncourt 2018... Un gag ?

31 Décembre 2019 , Rédigé par Christian Eckert

Un article de presse d’un journal du soir décrit l’admiration de nombreux macronistes pour le livre de Nicolas Mathieu « Leurs enfants après eux » (prix Goncourt 2018). Le journaliste y relate l’admiration surprenante de Julien de Normandie, Gabriel Attal, Sibeth Ndiaye ou encore Pierre Person pour un livre dont l’auteur ne cesse de dire son aversion pour leur Président et ses réformes. Le sujet est intéressant, original voire surprenant et mérite d’être prolongé.

 

Je me sens, sans prétention, quelque peu légitime à le faire : je suis né dans la vallée qui sert de décor au roman, dans un milieu modeste, entouré de familles d’ouvriers et de mineurs. J’y ai vécu mon enfance et mon adolescence quelques années avant les personnages du livre. J’ai accompli des jobs d’été dans les aciéries de Florange, bourgade devenue célèbre pour ses hauts fourneaux alors rougeoyants. J’ai enseigné 10 ans au Lycée public de Fameck (Lameck dans de livre…), ville qui était alors pour la Lorraine ce que la Seine-Saint-Denis est aujourd’hui pour la France. J’ai habité (et demeure encore) dans le Pays-Haut voisin et y ai été Maire 27 ans d’une ville où les mineurs de fer ont occupé le fond de leur mine en 1963 pendant 79 jours (y compris le soir du réveillon de Noël) pour protester contre les licenciements. J’ai été élu deux fois député de la circonscription de Longwy, où on me tutoyait sur les marchés plus souvent qu’à Bercy où m’a conduit mon parcours politique.

 

Je suis « sorti » mal à l’aise du livre de Nicolas Mathieu, dont les qualités littéraires sont pourtant incontestables. Un peu comme un enseignant qui regarde un enregistrement de son propre cours et y découvre tous ses défauts même anodins qu’il ne perçoit pas quand il est pris par le feu de sa leçon. Je ne m’y suis qu’assez peu retrouvé, sans doute parce que j’attendais un portrait enjolivé par l’attachement que j’ai pour mon territoire J’y ai trouvé une description des difficultés et des déceptions, certes connues et fréquentes, mais insupportables à lire quand elles sont cumulées et concentrées sur quelques personnes.

 

Ce sentiment a été partagé par une partie de mon entourage familial et local. Pas tous… Les plus jeunes s’y sont mieux retrouvés. Des élus de la vallée de la Fensch ont publiquement regretté l’image grise - c’est peu dire - que donne le livre des lieux et de leurs habitants. Et surtout, le livre pourrait avoir son « contrepoint » : mes amis du collège d’Algrange, du lycée de Thionville ou de prépa à Metz sont légion à avoir connu l’ascenseur social : j’en ai revu des fils d’ouvrier, de mineur, de petits fonctionnaires, devenus ingénieurs, chefs d’entreprises, écrivains, hauts-fonctionnaires, toujours engagées dans les vies syndicales, politiques, associatives, sociales, souvent même au niveau national.

 

Ils ont connu les bienfaits de l’Ecole de la République, les miracles accomplis par les hussards de la République, les atouts de la République qui protège, la force transmise par l’ambition de leurs parents, « petits » immigrés ou pas, pour que vivent « leurs enfants après eux ». Aurélie Filippetti pourrait mieux que moi, en faire un roman.

 

Les nantis d’aujourd’hui, très nombreux et influents en Macronie, stigmatisent tout cela à longueur d’année en parlant de la nécessaire fin de l’Etat Providence ou, pire encore, de l’Assistanat. Pied à pied, pas à pas, petit à petit, ils démontent les mécanismes de solidarité, encouragent l’individualisme, poussent aux inégalités, ferment les frontières aux affamés « en même temps » qu’ils les ouvrent aux capitaux.

 

Alors voilà que subitement, ceux-là, qui ont pour beaucoup fréquenté l’école alsacienne, ont peu franchi le périphérique, ne se sont jamais encanaillé dans une fête de village un peu glauque, ont connu tous les films en avant-première et se sont ennuyés dans des bibliothèques rutilantes, s’ébahissent devant un livre. Ils découvrent ce roman d’un réalisme criant, qui décrit l’absence de perspective autant que l’échec, la récession plus que l’immobilisme, la pauvreté intellectuelle plutôt que la faim…

 

Oui, dans l’ancien monde, que l’on dit ringard, beaucoup d’élus dont une poignée arrivaient jusqu’à Paris, connaissaient cette vraie vie, en étaient issus et même parfois « sortis » ! Aujourd’hui les nouveaux la découvrent dans les livres. C’est déjà ça.

 

Alors qu’ils en tirent donc les leçons : la priorité n’est certainement pas de réformer pour libéraliser. Elle est de faire société par l’organisation des solidarités territoriales, éducatives, générationnelles, culturelles. C’est avant tout cela que nous apprend le livre de Nicolas Mathieu.

 

Faute de cela, le prochain livre qui sera au menu des macronistes pourrait bien être un livre noir. Ce serait là notre véritable échec pour « les enfants d’après nous ».

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L'universalité est un leurre...

26 Décembre 2019 , Rédigé par Christian Eckert

En apportant une nouvelle fois une de mes pierres à l’édifice des retraites, je vais sans doute encore provoquer des réactions diverses.

 

Le discours sur l’universalité et les points qui mettraient justice et égalité en lieu et place des trimestres et des régimes différents est une ânerie :  les tergiversations et les nombreuses exceptions entament jour après jour le principe affiché d’un régime identique pour tous. C.Q.F.D.

 

Je suis né dans le Nord de la Lorraine, au pays des mines de fer. Je vis à Trieux, petite ville où les mineurs ont occupé le fond de leur mine (y compris le soir de Noël) en 1963 pendant 79 jours. Ils protestaient contre leur licenciement et la disparition de leur outil de travail. J'en ai été Maire pendant 27 ans, succédant aux deux leaders syndicaux de la grève...

Outre le fait qu’eux aussi avaient refusé une trêve pour les fêtes, parler d’eux illustre mon propos initial. Les mineurs avaient un régime spécial : ils bénéficiaient du droit à la retraite après 30 années de travail « au fond ». Beaucoup avaient d’ailleurs commencé à travailler très jeunes… Certains les trouvaient privilégiés.

Pourtant, la plupart d’entre eux mourraient peu de temps après la fin de leur carrière, tant leurs conditions de travail étaient rudes. Et comme il ne reste plus qu’une poignée de mineurs actifs aujourd’hui, la caisse de retraite des mines (qui sert encore des pensions surtout à des veuves !) a été stigmatisée pour ses déficits inévitables.

 

Cet exemple est à méditer : Les conditions de travail, l’espérance de vie et la démographie des actifs et des retraités engendrent une extrême hétérogénéité entre les secteurs d’activité.

 

Le système actuel a, au fil du temps, géré ces différences par des accords de branche, en exigeant plus ou moins de trimestres pour tenir compte des situations et en adoptant un calcul des retraites variable suivant les catégories. Le temps a évidemment changé certaines des conditions de travail et bouleversé des équilibres démographiques. Des mises à jour sont nécessaires, mais par la négociation, le dialogue et en revalorisant aussi les salaires des actifs comme pour les enseignants.

 

Que l’on compte en points ou en trimestres, on retrouve en fait les mêmes difficultés : celles d’attribuer des trimestres « gratuits » (enfants, services militaires, pénibilité, périodes de chômage…) ou de bonifier des points (pour les mêmes cas particuliers).

 

Tout le monde parle de la valeur de service du point. C’est certes important. Mais les conditions d’obtention des points est encore plus essentiel ! Au passage, je rappelle que seules 90% des cotisations seraient converties en points… Et que le couplet sur les pauvres hauts salaires qui cotiseront un petit peu pour rien, oublie de dire que c’est le cas pour tous !!!!

 

Plus que le principe des points (qui trouvera sans doute les mêmes réponses complexes que le décompte des trimestres…) c’est donc l’idée d’une gestion respectueuse des métiers qui devrait prévaloir. A l’inverse de ce qui est mis en avant par le Gouvernement. Accepter les différences et les effacer au mieux par des règles spécifiques, c’est sans doute plus républicain que de les prolonger par un dispositif injustement simpliste.

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L'âge d'équilibre, il sort d'où ?

18 Décembre 2019 , Rédigé par Christian Eckert

Les faits, rien que les faits :

 

Édouard Philippe a parlé au CESE pendant une heure pour préciser son projet de nouveau système des retraites. J’ai attentivement écouté son propos. J’ai beaucoup vécu ce genre d’exercice, souvent comme auditeur et même quelques fois dans le rôle de l’orateur.

 

Le raisonnement du Premier des Ministres est assez simple et peut séduire : on vit plus longtemps et nous ouvrons de nouveaux droits. Par conséquent, il faut introduire un système qui incitera (voire obligera) les actifs à travailler plus longtemps.

 

Lorsqu’on construit un projet, on bouge des curseurs et on modifie des règles. La première question qu’on se pose pour chaque modification envisagée est : « combien ça coûte ? ».

 

Par exemple : fixer une retraite minimale à 1000 Euros (pour ceux qui auront eu une carrière complète au SMIC selon le Premier Ministre) est évidemment présenté comme un gros progrès social. Il me semble qu’actuellement c’est déjà presque le cas, mais personne ne sait combien de personnes seront concernées et encore moins quel est le coût de cette mesure.

 

On nous dit que les périodes de « petit boulot » compteront systématiquement et donneront des droits. Pourquoi pas… Mais combien de personnes seront concernées et quel est le coût de cette mesure ?

 

On nous dit qu’au lieu d’avoir 8 trimestres par enfant comme beaucoup aujourd’hui, les femmes auront 5% de points de plus et que c’est mieux pour elles. Je n’en suis pas sûr, mais en tout cas : combien de personnes seront concernées et quel est le coût de cette mesure ?

 

On nous dit que les hauts salaires cotiseront (un tout petit peu) pour rien dès 10 000 Euros par mois. C’était à partir de 27 000 aujourd’hui. Mais on oublie de dire que cette cotisation "pour rien" s’appliquera à tous et personne ne sait combien de cotisations seront ainsi perdues à l’avenir.

 

Je pourrais continuer longtemps comme cela.

 

Dans son discours d’une heure, le Premier Ministre N’A DONNE AUCUN CHIFFRAGE. J’ai cherché aussi en vain les "tableaux d'équilibre" dans le rapport de Monsieur Delevoye …

 

Et pourtant…

 

Pour avoir été 3 ans Secrétaire d’Etat en charge du Budget et des comptes publics (qui incluent les retraites), je ne crois pas une seconde que ces chiffrages n’ont pas été faits. Je suis sûr que, année par année, mesure par mesure, les services ont fourni tous les chiffres, toutes les simulations et toutes les prévisions pour calculer les économies engrangées ou les dépenses supplémentaires engendrées ! Un Gouvernement serait fou de ne pas procéder ainsi pour faire ses choix en toute connaissance de cause.

 

Sans avoir donné le moindre chiffrage des mesures annoncées, le seul point précis du discours du Premier Ministre a été de dire qu’il faut, dès 2022, prévoir un malus sur la retraite de celles et ceux qui exerceraient leur droit de partir à 62 ans, avant l’âge pivot.

 

Voilà une nouvelle méthode : vous mettez des articles dans un caddie. Vous ne connaissez aucun prix et d'ailleurs, vous ne choisissez même pas les articles. Mais vous passez à la caisse et on vous jure que le prix est le bon et que vous avez fait une affaire !

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Le magot caché par le Gouvernement pour imposer l'âge d'équilibre

12 Décembre 2019 , Rédigé par Christian Eckert

Le pays n’a rien à gagner d’un conflit social majeur en cette période.

 

Une des principales raisons de l’extension et de l’enlisement de cette crise est l’acharnement du Gouvernement à tout mélanger : il met en avant un possible déséquilibre du système pour justifier, de façon à peine déguisée, une incitation voire une obligation pour chacun de reculer l’âge de son départ en retraite.

 

J’ai depuis septembre (voir mon post complet ici), demandé à ce que TOUS les paramètres soient intégrés à la réflexion. Outre les réserves de certaines caisses (que le Gouvernement s’est engagé à laisser de côté), il existe un fonds de réserve des retraites doté de plus de 30 Milliards. C’est déjà une belle somme… Mais là n’est pas l’essentiel.

 

La dette de la Sécu a été logée dans une structure appelée Caisse d’Amortissement de la Dette Sociale (CADES). Tous les ans, la CADES est alimentée par des recettes (la CRDS, des fractions importantes de CSG, …). En 2024, grâce à ces recettes, la dette de la CADES aura été entièrement remboursée ! Les recettes de la CADES sont estimées à 24 Milliards en 2024. Elles seront donc disponibles TOUS LES ANS, sans aucun prélèvement supplémentaire ! Le Gouvernement aura donc le choix :

 

  • Diminuer les impôts de 24 Milliards (!)
  • Affecter ces sommes à d’autres actions (On pourrait par exemple utiliser 4 ou 5 Milliards pour financer la dépendance).
  • Consacrer tout ou partie de cette somme à gommer les inégalités des retraites.

 

Que l’on compte en trimestres ou en points, on est confronté au financement des mesures de justice : retraite minimale, cas des femmes, prise en compte de la pénibilité…

 

Mais compte tenu de la marge de manœuvre énorme suite à la fin de la dette logée dans la CADES, la mise en place d’un âge pivot ou d’équilibre ne s’impose absolument pas.

 

J’observe qu’aucun membre du Gouvernement ne contredit les faits que je rapporte. Le mutisme des Ministres sur ce point est un aveu. L’objectif est ailleurs.

 

Pour celles et ceux qui auraient des doutes, je rapporte (un fois de plus) les propos du Président de la CADES :

 

« Au total, c’est une somme de 24 milliards d’euros en valeur 2024 qui sera disponible dont 9 milliards au seul titre de la CRDS. Aucun gouvernement ne s’était trouvé historiquement à devoir arbitrer l’affectation d’une telle manne. » (Jean Louis Rey, Président de la CADES, décembre 2018).

 

Pourquoi cacher aux français que 24 Milliards de leurs impôts seront disponibles tous les ans à partir de 2024 ?

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Retraites des hauts revenus : cotiser moins pour capitaliser plus !

11 Décembre 2019 , Rédigé par Christian Eckert

La clarté et l’honnêteté imposent de préciser ce que prévoit le Gouvernement pour les personnes qui ont des salaires très importants. Thomas Piketty et d’autres l’ont évoqué et des précisions peuvent être apportées :

 

Le Gouvernement se flatte d’imposer une cotisation « de solidarité » aux personnes disposant de plus de 10 000 € de revenus mensuels. Il précise que la cotisation (2.81% des revenus dépassant 10 000 € mensuels) ne donne pas lieux à acquisition de points.

Le Gouvernement oublie de dire deux choses :

 

  • TOUS les cotisants, y compris les plus modestes, paient cette cotisation de 2.81% sans acquérir de points.

 

  • Jusqu’alors les hauts salaires cotisent de façon obligatoire au taux normal jusqu’à 27 000 € par mois et à hauteur de 2.3% au-delà.

 

On aura donc compris que les personnes que l’ont prétend mettre à contribution vont très nettement moins cotiser qu’avant sur leurs revenus entre 10 000 € et 27 000 € (2.81 % au lieu de 28.1 %). Ils cotiseront un tout petit peu plus pour les revenus dépassant 27 000 € (2.81 % au lieu de 2.3 %).

 

Cette perte de recettes n’est pas chiffrée, mais certains avancent des montants de plusieurs Milliards par an !

 

Le Gouvernement se dédouane en disant que cette baisse de cotisations entrainera pour ces personnes une baisse du nombre de points acquis donc une baisse du niveau de retraite à terme.

 

Là encore, il oublie de parler du montage qu’il construit méthodiquement : Dans la loi PACTE, il a créé le cadre juridique qui permettra aux assurances privées de proposer des retraites par capitalisation. Il prévoie aussi les avantages fiscaux pour inciter les hauts revenus à s’y précipiter.

 

La boucle est bouclée… Les propos du Premier Ministre sur sa volonté de maintenir un système par répartition sont pour le moins écornés. C’est une raison de plus pour se mobiliser.

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Pour les retraites, évitons de confondre égalité et uniformité...

8 Décembre 2019 , Rédigé par Christian Eckert

Tout a été dit sur la maladresse du Gouvernement et sa façon d’imposer sa réforme des retraites. Inutile d’en rajouter.

 

Mon propos de ce jour - et qui n’engage que moi - vise avant tout avec modestie à donner une analyse personnelle, à formuler quelques avis et à oser quelques propositions… Être critique n'exclut ni la possibilité ni la volonté d'être utile.

 

Le Gouvernement ne peut pas facilement faire croire à l’effondrement programmé du nos régimes de retraites. D’abord parce que c’est faux, comme je l’ai écrit dès septembre. Mon post a inspiré d’autres analystes et peut utilement être relu ici. Ensuite parce que les français sont loin d’être idiots : on ne peut pas sérieusement leur dire que le nouveau système ne fait pas baisser les pensions mais permet de mieux trouver l’équilibre sans augmenter les cotisations.

L’universalisation et la fin des régimes spéciaux est donc son principal argument. Cela fonctionne assez bien, pour les simples d’esprit qui confondent équité et uniformité. Comme si chercher l’égalité conduisait à ignorer les différences, la diversité et l’hétérogénéité des situations humaines. Comme si les conventions collectives étaient nées de rien et n’étaient pas le fruit d’un équilibre issu du dialogue social.

Je crains que d’autres arrières pensés n’existent aussi dans certains esprits gouvernementaux : à force d’instiller l’idée que le régime des retraites n’est ni juste ni durable, les solutions individuelles de types assurance privées pourraient naturellement être présentées comme le seul recours…

 

Pour autant, le Gouvernement n’a pas remis en cause le principe de retraite par répartition. Soit…

 

Il répète en boucle qu’un euro cotisé donnera à chacun les mêmes droits. C’est séduisant, cela semble simple, mais c’est à côté de la plaque : au lieu de compter des trimestres de cotisation pour ouvrir les droits, le Gouvernement propose de compter des points proportionnels (ou presque) au salaire perçu. On ne règle en rien les injustices que tout le monde reconnait : interruption de carrières pour les femmes ou les chômeurs, prise en compte de la pénibilité des métiers, du temps partiel souvent subi, différence d’espérance de vie en fonction des métiers… Le système actuel attribue des trimestres en plus pour tenir compte de ces cas particuliers... Le Gouvernement ne propose pas clairement d’attribuer des points supplémentaires en fonction de ces situations particulières.

On focalise sur la valeur du point pour déterminer le niveau de la pension. On devrait plutôt chercher à gommer les très nombreuses inégalités en jouant sur le nombre de points attribués.

 

Il serait donc plus sage de remettre en chantier ce sujet avec un vrai débat global. On peut « en même temps » avancer sur quelques sujets qui pourraient faire consensus, comme par exemple :

 

  • Fixer un niveau minimal décent des pensions pour les carrières complètes. C'est d'ailleurs une proposition du rapport du haut commissaire.
  • Prévoir un système de réversion identique pour tous, qui ne diminue pour personne les droits actuels (ni en niveau, ni en âge d’attribution).
  • Aligner définitivement la revalorisation des pensions sur des critères préservant le pouvoir d’achat (inflation, salaires, croissance).
  • Travailler sur la prise en compte des primes ou le niveau des salaires (pour les enseignants par exemple). Et pas sur un coin de table.

 

Traiter simultanément tous les sujets dans une ambiance anxiogène en imposant une réforme copernicienne n’est sûrement pas la solution. Quand un sujet est complexe (celui-ci l’est particulièrement), il vaut mieux chercher ce qui rassemble plutôt que pointer ce qui divise.

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France Luxembourg : beaucoup de questions subsistent...

10 Octobre 2019 , Rédigé par Christian Eckert

Les Ministres des finances des deux pays (France et Luxembourg) ont signé discrètement un avenant à une convention qui les lie et qui inquiétait  légitimement les frontaliers, notamment ceux qui ont de petits salaires (voir mon post précédent ici). Il faut rappeler ici que ces conventions doivent être ratifiées (dans chaque pays) par les Parlements.

Or, il semble que l'avenant signé par les Ministres revienne également sur un autre sujet très important (voir ici l'encadré de l'article du "Quotidien). Contrairement au standard international de l'OCDE, les pensions des travailleurs frontaliers français seront à l'avenir imposées au Luxembourg, comme par le passé où c'était déjà anormal. Le plus souvent, ces retraités résident en France. Leur nombre est appelé à une très forte croissance....

Lors de la ratification de cet avenant, il faut espérer que les parlementaires soient attentifs ! Y aura-t-il des simulations, des études de cas ? Le dernier exemple doit servir de leçon !

Intuitivement pour les futurs retraités contribuables, cela ne devrait pas être trop gênant, même si, comme nous l'a rappelé l'affaire des actifs, l'impôt sur le revenu est plus élevé au Luxembourg qu'en France sauf pour les bas salaires.

Mais pour la France, cela représente une lourde perte au profit du Luxembourg qui semble ne pas en avoir un besoin pressant ! Quelqu'un a-t-il chiffré cette évaporation fiscale ?

Qu'est ce qui a motivé cette largesse subite de la France ? D'autres sujets européens ont-ils été mis dans la balance entre les deux pays ? L'Union est en pleine recomposition et les luttes d'influence sont nombreuses pour différents postes...

Mais sans doute y a-t-il des raisons plus morales que j'ignore....

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