Pause des confiseurs...
Bon, je sais, c'est pas bien...
Un jour, une journaliste qui m'appelait vers 15 heures un dimanche, s'étonnait que je ne veuille pas lui répondre sous prétexte que j'étais au milieu d'un repas de famille...
"Vous êtes député, et à ce titre, devez être disponible 7j/7 et 24h/24..." J'ai raccroché...
Depuis, j'ai un SMS tout prêt qui dit : "Bien que laïque, le dimanche, je pratique... La famille..."
Je fais néanmoins des entorses... On ne se refait pas... Mais le plus souvent, les gens comprennent...
Tout ça pour dire, que sauf événement majeur, ce blog est en vacances ! Pour deux petites semaines...
Bien sûr, le blog vous souhaite de belles et bonnes fêtes, chaleureuses, en famille, entre amis... Que l'année à venir vous récupère en pleine forme !
Lois, décrets, arrêtés, instructions, circulaires... Qui fait quoi ?
L'organisation des textes et leurs conséquences réelles échappent un peu trop au citoyen lambda, et parfois même aux parlementaires (!).
Il m'apparait nécessaire d'en faire un peu la description et d'en donner les subtilités au travers de quelques exemples significatifs.
Rappelons avant tout que le Parlement vote la loi, et que le Gouvernement assure son exécution. Ces deux fonctions sont séparées constitutionnellement pour éviter
les risques évidents d'une concentration excessive des pouvoirs.
La séparation des pouvoirs "législatif/exécutif" parfois floue, est de plus influencée par trois autres dispositions que je cite pour mémoire :
- - L'ordre du jour du Parlement est fixé par le Gouvernement, et comprend un immense majorité de Projets de loi d'origine gouvernementale. Si les parlementaires peuvent déposer des Propositions de loi - ce dont ils usent souvent pour leur communication personnelle - celles-ci ne sont la plupart du temps pas même discutées en séances faute d'inscription à l'ordre du jour ! Seules quelques (rares) journées sont réservées à l'initiative des groupes parlementaires, qui en fixent alors le contenu avec une issue incertaine et sans grande chance de succès.
- - Le pouvoir de tous les parlementaires d'amender (comprenez modifier) les textes étudiés avant leur adoption est reconnu par la constitution. Pour autant, les amendements ne sont étudiés que s'ils respectent des conditions précises (se rapporter strictement au texte en discussion, ne pas alourdir la dépense publique...). Ainsi de nombreuses propositions d'amendement sont déclarés irrecevables et vont immédiatement à la corbeille !
- - Outre son pouvoir législatif, le Parlement a un devoir de contrôle de l'action du Gouvernement. Ainsi, tous les ans, il commente et décrit la mise en oeuvre des textes votés, analyse l'action détaillée du Gouvernement, notamment en matière d'exécution budgétaire. Il pointe aussi les retards et manquements à l'esprit et à la lettre des lois adoptées.
Mais le propos de ce jour est d'essayer de différencier ce qui relève de la Loi et de ce qui relève du règlement :
Le législateur vote des lois qui ont un caractère général et qui ne sauraient rentrer dans des détails complexes et techniques faute de temps et de compétences. Ainsi, un texte de loi contient souvent des renvois à des "décrets d'application", avec des formules du type : " Un décret pris en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent alinéa...".
Prenons un exemple récent et volontairement caricatural :
Nous sommes en train de décider que les travaux effectués pour assurer la transition énergétique des logements bénéficieront d'un taux réduit de TVA. Elle renvoie la liste détaillée des travaux concernés à un décret qui en fixera le contenu exact. Faut-il prendre en compte le remplacement des chaudières, et avec quelle normes ? Faut-il rendre éligibles les travaux d'isolation et avec quels types de matériaux ? La pose de thermostats d'ambiance ou de simples robinets thermostatiques sont-ils éligibles ? Les travaux de platrerie induits par la pose d'huisseries isolantes sont-ils concernés ? La géothermie est-elle visée ? Le chauffage solaire de l'eau chaude au robinet est-il dans l'assiette ? Tout comme les récupérateurs d'eaux pluviales ? Ou encore les installations utilisant du méthane d'origine organique...
Le Parlement ne peut examiner tous ces détails (qui n'en sont pas toujours !). La loi précise souvent quelques uns de ces points, mais en confie la déclinaison à d'autres. Le Conseil d'Etat le fait en veillant à respecter l'esprit du Législateur, d'où l'importance des propos tenus en séance qui font pour lui référence en la matière. Le Gouvernement le fait aussi par des instructions à son administration, qui deviennent la partie réglementaire chargée de mettre en oeuvre la loi. On mesure ainsi les risques : il arrive que des décrets ne soient pas pris et empêchent ainsi la loi de s'appliquer ! Il arrive aussi que des décrets trahissent aussi la pensée du Législateur en allant plus ou moins loin dans les critères techniques retenus pour appliquer un texte... Le contrôle du Parlement - qui n'est pas sa fonction la plus connue - s'exerce alors et peut redresser les dérives.
La réalité peut aussi aller plus loin dans la confusion des responsabilités :
La récente affaire de la réforme du statut des professeurs de classes préparatoires qui a fait l'objet de controverses en est un autre exemple. Jamais le Parlement n'a discuté de ce point. Il vote les crédits du Ministère de l'Education Nationale, en fixe les plafonds d'emplois, mais ne se prononce pas sur les grilles salariales, le nombre d'heures effectuées par les professeurs, variable suivant leurs grades et les classes où ils officient ! S'ils peuvent interroger le Ministre, lui donner leur point de vue personnel, ces questions d'organisation relèvent de la partie réglementaire et de la seule responsabilité du Ministre. Il en va de même de la fixation des programmes, et aussi de la question des rythmes scolaires qui fait tant débat et qui relève d'un décret du Ministre. Ces décrets comme tous les actes administratifs peuvent être contestés devant les juridictions administratives...
Dans ce même registre, on peut s'étonner de la chronologie de certaines décisions :
Prenons là encore deux exemples symptomatiques :
- - Celui de la fiscalité des plus-values des immeubles. Ces règles fiscales relèvent des lois de finances car elles ont des conséquences financières importantes en matière de recettes et donc influent sur le déficit public. Cet été est annoncée une réduction des durées d'amortissement des immeubles bâtis et un abattement exceptionnel pour un an de 25%. Cela réduit assez significativement les droits à payer sur les bénéfices réalisés en vendant des immeubles. Sitot annoncée, cette réforme est mise en oeuvre par une instruction fiscale à compter du 1° août. Le Parlement ne la votera que dans deux jours ! Tout amendement viendrait modifier les conditions des ventes réalisées les 6 derniers mois... On imagine les surprises, bonnes ou mauvaises, de ceux qui ont réalisé des transactions ! Le Parlement sera naturellement conduit à valider purement et simplement à postériori les décisions du Gouvernement. En l'occurence, c'est une mesure saluée unanimement, mais quand même...
- - Le second exemple est du même type et concerne les plus-values des valeurs mobilières, souvent évoquées sur ce blog. Des "assises de l'entrepreneuriat" ont été organisées cette année entre-autre sur l'imposition des bébéfices de revente des actions. Elles ont été conclues par des engagements. Un nouveau régime - là n'est pas le sujet - a été annoncé. Ici aussi il est très favorable, tant mieux pour la croissance et tant pis pour les recettes... Il est aussi mis en oeuvre depuis le 1° janvier 2013. Il ne sera voté que dans deux jours, et les amendements sont inenvisageables car risquant de "mettre le feu aux poudres" en donnant le sentiment de yoyo fiscal, dont on peut comprendre les irritations qu'il inspire.
Au delà de ces exemples, que l'on pourrait multiplier, le problème soulevé est de clarifier les responsabilités des parlementaires et du Gouvernement. Certes, ce dernier s'appuie sur une majorité au Parlement, incertaine aujourd'hui au Sénat, mais toujours forte à l'Assemblée Nationale, ce qui permet de gouverner en toute quiétude.
La gestion du temps, des annonces et de leur adoption dans la loi, comme celle de leur mise en oeuvre concrète dans des délais rapides au vu des urgences économiques et sociales, mais compatibles avec leurs conséquences budgétaires, restent à peaufiner.
Les Parlementaires doivent éviter tous les abus...
« L’esprit des lois », leur bon usage et le rôle du législateur sont des questions de fond que l’actualité très souvent galopante ne doit pas nous faire oublier.
D’autant plus que les caricatures et les excès plus ou moins intéressés, ne résistent pas aux analyses précises, mais peuvent manipuler l’opinion publique qui ne passe pas ses journées -et c’est bien compréhensible- à décortiquer les travaux souvent abscons des députés et des juristes.
La loi consiste souvent à mettre en place des dispositifs destinés à aider ou à inciter, en les calibrant de la plus juste manière, en évitant leur utilisation excessive ou abusive, en punissant ceux qui les utiliseraient en fraudant.
Prenons deux exemples volontairement provocateurs, sans bien entendu vouloir un seul instant les mettre en concurrence, les opposer ou les prioriser, et en indiquant tout de suite que les deux me semblent indispensables et même complémentaires pour trouver un bon équilibre dans une société apaisée.
On parle souvent des aides sociales :
Fleurissent alors les discours type café du Commerce, sur les aides sociales « exagérées », les abus de ceux qui « profitent », la France des « assistés »… Chacun y va de son exemple vu chez le voisin, du RSA parait-il toujours supérieur au SMIC, du chômeur indemnisé en travaillant au noir, de la maman pas si seule que ça bénéficiant de l’allocation de parent isolé… Les mêmes moralisateurs se calment bien vite lorsqu’ils vont à l’hôpital se faire soigner gratuitement, ont un proche qui subit un licenciement économique, n’oublient jamais d’utiliser une niche fiscale peu justifiée, réclament leurs allocations familiales malgré des revenus confortables… Ce qui est de l’assistanat chez les autres est un droit pour soi, universel c’est bien connu. Ce qui est coûteux et insupportable pour la dépense publique quand cela bénéficie à « l’autre » devient derechef quand ça nous touche le juste retour de nos impôts ou nos cotisations sociales.
En la matière le rôle du législateur est de veiller à bien évaluer toutes les situations, si diverses soient-elles. Il est aussi de ne jamais oublier personne, surtout les plus nécessiteux, d’éviter les cumuls, les effets d’aubaine et les effets pervers. Cela conduit le plus souvent à complexifier les règles. On nous le reproche souvent, mais comment « pondre » des règles universelles tout en tenant compte de la multiplicité des situations à satisfaire ? La taille des familles, les inégalités territoriales, les capacités d’autonomies, les situations subies ou choisies, ne sont que quelques-uns des critères à intégrer dans les dispositions à vocation sociale qu’il nous est quotidien de travailler.
Le rôle du législateur est encore de donner aux administrations les consignes et les moyens du contrôle indispensables pour assure l’équité et l’égalité devant la loi. Là encore, le risque de dérive est évident. On a tous entendu parler de l’administration tatillonne, inquisitrice et lourdingue. On a tous entendu parler des vérifications qui coûtent plus cher que ce qu’elles rapportent. On a tous aussi entendu dénoncer par les mêmes, les administrations laxistes qui laisseraient passer ou fermeraient les yeux sur des abus manifestes…
Le rôle du législateur est enfin de prévoir de punir les fraudes. Une chose est de corriger, redresser, récupérer les sommes abusivement perçues, assorties éventuellement de pénalités ou d’intérêts moratoires, une autre est de punir les fraudes actives, par des poursuites pénales adaptées et proportionnées. Là encore, la frontière est souvent ténue entre l’omission, la négligence, la bonne foi ou la tentative de fraude qui elle est doit punie pour réparer pénalement la pratique illégale.
On parle aussi beaucoup des aides aux entreprises, fiscales ou directes :
Ici aussi, les discours caricaturaux trouvent place dans les repas de famille :
Qui n’a pas entendu parler de l’aide apportée à une entreprise, délocalisant rapidement après avoir profité des subventions ? Qui n’a entendu parler des montages d’optimisation fiscale d’entreprises installées fictivement dans un état à fiscalité bienveillante, exploitant dans un autre état le savoir-faire des salariés locaux ou la qualité de l’outil industriel existant ? Qui n’a pas entendu que tel ou tel fortuné minimise son ISF ou son impôt sur le revenu dans une niche censée favoriser les investissements, locatifs ou productifs outre-mer ou en France Métropolitaine, coutant parfois plus cher en frais de courtage et en avantage fiscaux que ce qu’elle investit dans les opérations censées être dynamisées ?
A l’inverse, en période de crise économique et sociale, comment comprendre que la « puissance publique », nationale ou locale, décide de ne pas inciter, par la subvention ou l’exonération fiscale, l’activité économique. Ceci malgré le risque inhérent à toute création d’activité, d’un échec possible, d’une délocalisation future, ou d’un coût financier supérieur au rendement obtenu. Comment ne pas entendre le message d’encouragement à donner eux entrepreneurs innovant, aux investisseurs risquant leur « propre argent » pour créer de l’emploi et de la richesse ?
Les dispositifs d’aide sont multiples, s’additionnent, se concurrencent parfois. Ils font appel à des sommes très importantes, à des règles prudentielles mouvantes, et s’inscrivent dans des doctrines européennes orthogonales au principe de la recherche d’implantations locales et durables, justifiant du principe de « retour sur investissement » que revendique le monde économique. Ce même principe est par les uns refusé à la sphère publique quand cela concerne le voisin, et par les autres réclamé pour eux-mêmes…
Notre travail de ces derniers mois a été important pour qualifier et réprimer les abus de droit en matière d’évasion et de fraude fiscale. Il serait long et difficile de le résumer ici compte tenu de la complexité du sujet, et n’est pas le cœur du propos du jour.
Ce (trop) long préambule pour parler calmement de la dernière affaire fiscale qui fait réagir voire rugir la sphère patronale ou entrepreneuriale, dont on me dit être personnellement à l’origine sur un de mes amendements en discussion au Parlement : La loi de finances rectificative (LFR 2013) instaure un nouveau Plan d’Epargne en Actions (PEA/PME) destiné à accueillir, hors de toute imposition sur les dividendes ou les plus-values réalisées à la revente, jusqu’à 75 000 Euros d’actions de PME. On peut en avoir deux par foyer fiscal, en plus des deux PEA classiques déjà possibles pour 150 000 Euros chacun. Cela permettra d’inciter les épargnants à investir dans des PME (voire dans des entreprises un peu plus grosses), afin d’accélérer le développement de l’économie si nécessaire à la croissance. La perte de recettes fiscales pour l’Etat qui renonce aux impôts traditionnellement perçus sur ces revenus est justifiée par le bénéfice économique et social obtenu par ces investissements…
Tout bien… cent fois d’accord… On perd des recettes, mais on en aura d’autres en créant emploi et richesses…
Sauf que…
Lors de nos travaux en commission, lors de nos auditions et rencontres avec les services fiscaux, on nous a dit avoir un problème important existant dans les PEA classiques qui peuvent déjà accueillir des actions de PME, créant une source d’évaporation importante de l’impôt :
Des petits malins, achètent à bas prix des actions « non cotées » de PME, les sous évaluent largement lors de l’entrée dans leur PEA personnel, les revendent plus tard à un plus juste prix en engrangeant un énorme bénéfice non imposé puisque fait dans un PEA… Légal et peu contrôlable, car à la différence des actions cotées en bourse, reflétant une valeur du marché collant assez bien à la réalité, les actions de PME font l’objet de peu de transactions et se négocient de gré à gré, en fonction de paramètres souvent subjectifs et néanmoins parfois respectables. Cela constitue aussi une façon de se rémunérer sans être imposé… Il faut toujours rappeler que l’impôt évité par les uns sur répercute sur les autres !
Devant ces alertes sérieuses et ce sujet à fort enjeu financier, j’ai proposé par voie d’amendement au PLFR effectivement d’accorder l’exonération TOTALE des plus-values de cession des titres non cotés détenus en direct dans un PEA, aux seuls titres détenus au moins 5 ans. J’ai proposé que pour des durées de détention plus courtes, on puisse toujours sans AUCUN impôt, voir leur valeur multipliée par trois. J’ai proposé que pour la seule partie excédentaire, la plus-value réalisée soit assujettie au nouveau barème (très allégé par rapport au droit en vigueur avant mai 2012), après des abattements atteignant déjà 50% après une seule année de détention… Il n’y a aucune taxation nouvelle, bien au contraire, et ceci se cumule hors PEA avec le crédit d’impôt ISF/PME qui peut atteindre 45 000 Euros, et avec la réduction d’impôts sur le revenu dite « Madelin » de 18 000 Euros.
Je suis donc traité depuis d'archaïque, de bolchévique, de fou des taxes, de tueur d'initiative, de mépriseur de la prise de risque, de fossoyeur de l'économie
moderne... Chacun jugera... Où est la justice fiscale et l'intérêt général en limitant à x3 l'exonération totale d'impôt en moins de 5 ans, et en assujettissant le surplus à un barème plus
favorable que celui de l'impôt sur le revenu par le jeu d'un cadeau de 50% après un an de prise de risque...
Sur la forme, il n’y a pas de yoyo ni de harcèlement fiscal : Il y a un fonctionnement du Parlement, qui tient compte des propositions du Gouvernement, des assises de l’entreprenariat, des interventions des organisations socio-professionnelles, que je rencontre ou dont je reçois les avis régulièrement, mais aussi d’une contrainte budgétaire qui consiste à chercher un juste équilibre des contributeurs à la réduction des déficits, qu’ils soient salariés, retraités ou entrepreneurs.
Sur le fond, il m’apparait que le rôle du Parlement est de voter les textes les plus justes, évitant les abus tout en incitant à l’investissement. La seule volonté exprimée par ce type d’amendement est d’éviter les abus, car après tout, c’est ici de l’argent public qui est en jeu.
Les noms d’oiseaux et les surnoms dont on m’affuble n’y changent rien. Le fait d’avoir été à l’école de la République et d’avoir été agrégé de Mathématiques ne me
donne aucun droit, mais ne constitue pas une tare. Je ne paie pas l’ISF, ne suis pas dans une tranche d’impôt à 45%, et ai de l’admiration et du respect pour ceux qui en ont la chance. Je connais
aussi bien le monde de l'entreprise que les entrepreneurs connaissent le monde qui les entoure.
La loi est faite par des parlementaires, qui y réfléchissent plus qu’on ne le pense, et qui sont heureusement renouvelables tous les 5 ans suivant la volonté des électeurs.
J’ai déjà eu l’occasion de dire que légiférer engendre des effets d’aubaine et des effets pervers. C’est incontestable. C’est aussi l’occasion de réfléchir à la question : « Vaut-il mieux pêcher par excès ou par défaut ? ». Si j’ai volontairement et de façon provocatrice mis en regard les excès possibles en matière d’action sociale comme en matière d’aide aux entreprises, c’est pour inviter chacun à la mesure, et surtout à la raison…
Cette question est à mon sens un des points importants du débat politique.
Ligne droite, pente raide... Un peu d'humour...
Commencé formellement depuis la fin septembre, plus tôt pour mes services et moi, le marathon budgétaire touche à sa fin.
Réunions de commission, séances publiques, allers-retours incessants avec les Ministères, c'est la dernière ligne droite avant l'adoption prévue le 19 décembre des deux lois de finances en seconde lecture, la loi de finances initiale pour 2014 (LFI 2014) et la Loi de finances rectificative pour 2013 (LFR 2013).
C'est l'occasion des réglages de dernière minute. Souvent d'une technicité importante.
Amendements déposés tardivement, tensions sur quelques désaccords entre la majorité et le Gouvernement ou entre députés, réponses tardives à nos questions sur les enjeux et les chiffrages, le stress est intense et la fatigue générale rend nerveux tout le monde.
Il faut rester zen, donner l'exemple en calmant les uns, mobilisant les autres, et au moins paraître sûr de soi et en pleine forme pour rassurer et rendre serein...
Ce matin, un peu de temps se dégage pour fréquenter la réunion du Groupe PS sur le rapport Bailly, relatif au travail dominical. Ce sujet complexe avait été un moment fort de la précédente législature...
Les propositions sont intéressantes, bien argumentées... Il y manque probablement quelques mesures relatives aux droits des salariés. L'approche par la négociation sociale ou territoriale ne suffira pas à les protéger, parfois contre eux-mêmes...
A la fin de mon intervention, assez critique je dois dire, je détends l'atmosphère en distillant une pensée empruntée au "Chat"... Geluck est un dessinateur qui me donne des fous rires mémorables, même seul dans mon lit... Il fait parfois beaucoup plus réfléchir que rire...
Concernant le dimanche il dit :
"Si j'avais été Dieu, le septième jour, je ne me serais pas reposé... J'aurais
fignolé...!"
Un peu d'humour dans un monde qui certes à besoin d'un peu plus que du "fignolage" !!!
Justement, ce soir, réunion de travail à Matignon pour organiser la remise à plat de "la réforme fiscale"... Geluck pourrait faire un beau dessin pour remettre à plat le Chat, qui se trouve parfois un peu trop gros... Ou encore disserter sur le sens des mots : "réforme", "révolution", "remise à plat"...
Même en plein boum, au milieu de questions très sérieuses, on peut rire ou sourire en travaillant. Ca peut aider à réfléchir.
Rendre Hommage, c'est suivre le chemin !
Mon billet d'avant hier a provoqué bien des réactions... Tant mieux, le débat est sain...
L'ampleur des réactions, leur nombre, leur pertinence parfois, leur violence d'autres fois, m'ont pourtant surpris.
J'ai reçu directement ou indirectement de très nombreux messages. 90% d'encouragement ou de remerciement...
Aucune gloire à en tirer. Simplement,
- à ceux qui ont cru que je voulais faire ma pub ou faire de la récupération politique,
- à ceux qui ont cru que j'aurai pu avoir la vanité de me comparer à Nelson Mandela,
- à ceux qui m'ont fait remarquer que la Gauche n'avait pas le monopole du coeur,
je veux tout simplement dire que Nelson Mandela est parti au moment où je voyais les députés d'opposition défiler à la tribune de notre Assemblée Nationale (pas le comptoir du café du commerce), traiter ce gouvernement de laxiste parce qu'il soigne et héberge sans distinguer autrement que par les besoins. Comme si l'origine, la race, la religion, la nationalité, la couleur de peau, ou tout autre critère permettraient de trier des êtres humains entre eux pour les aider...
Parmi les nombreux commentaires reçus, l'un d'entre eux résume ma pensée :
" Rendre hommage, c'est suivre le chemin ! "
Mon but était effectivement de souligner que beaucoup de ceux qui rendaient hommage à Nelson Mandela, avaient des actes contraires aux valeurs qu'il défendait.
Toute autre comparaison serait évidemment prétentieuse et incongrue.
Les hommages hypocrites à Nelson Mandela...
Nelson Mandela est mort. Le monde pleure sa mort, son peuple chante sa vie.
En son hommage, j’ai choisi de vous raconter un affreux conte de Noël :
Je suis Maire depuis 1987 d’une petite commune de Lorraine, au cœur du pays des mines de fer. Il y a 50 ans exactement, malgré l’occupation durant 79 jours du fond de la mine par les mineurs licenciés, l’exploitation a été fermée, provoquant la ruine sociale de la ville et de ses
habitants.
Les cités minières à l’image des corons du Nord sont à l’abandon. La rue la plus dégradée, la rue d’Alsace, héberge dans des minuscules appartements des
familles très pauvres pendant de longues années.
Dans les années 90, y vit un couple des plus modestes. Le père, Charly, travaille dur pour un salaire de misère. Je le côtoie dans le vieux bistrot de la grand-mère de ma femme, où il aime venir se réchauffer et boire un ou deux canons, parfois même un peu plus.... Ses deux garçons vont à
l’école du village avec mes filles. Tout le monde s’émerveille de leur politesse, leur sérieux et leur propreté.
Une dizaine d’années plus tard, l’épouse de Charly me demande un rendez-vous en Mairie autour du 20 Décembre. Elle arrive, manifestement gênée, s’excuse trois
fois de me déranger, et finit par me dire qu’elle attend l’arrivée d’un de ses fils militaire pour sa permission de Noël et qu’elle n’a pas le moindre sou pour garnir la table familiale durant les fêtes. L’autre garçon l’a promue grand-mère d’une petite fille, et la famille aimerait réveillonner comme tout le monde… Je la rassure, lui
délivre un bon d’achat d’alimentation du CCAS.
Au passage, elle me confie qu’elle est un peu souffrante et n’a même plus le moindre sou pour acheter ses médicaments, « pour la circulation du sang ». Je la dispute un peu : Notre département, administré par mon ami Michel Dinet, est alors un des seuls en France à avoir mis en place à titre expérimental, ce qui deviendra plus tard la couverture maladie universelle (CMU). Je lui recommande de venir voir notre assistante sociale rapidement, pour faire le dossier, et qu’elle n’aura alors plus à avancer l’argent pour se soigner.
Elle me quitte alors, son bon alimentaire soigneusement plié entre les mains, non sans avoir redit ses regrets d’avoir osé déranger « Monsieur le
Maire » pour si peu…
Elle n’est jamais revenue voir l’assistante sociale… Le lendemain du réveillon, le commandant des pompiers de ma ville, m’appelle pour me dire que la nuit
précédente, les pompiers sont allés rue d’Alsace d’urgence. L’épouse de Charly était morte brutalement, sa petite fille dans les bras, la nuit du réveillon : « La circulation du
sang »…sans les médicaments…
Cet affreux conte de Noël n’est pas inventé. Il fait partie de ce qui me pousse à faire de la politique à Gauche.
En ces temps de débat budgétaire, j’ai entendu presque tous les députés de droite dénoncer les dérapages budgétaires de l’Aide Médicale d’Etat (AME), des crédits
de l’hébergement d’urgence ou encore les travers du RSA… Pensez donc : ces pauvres, pas toujours français, parfois en situation irrégulière, venus
parfois en risquant de se noyer, et qui profitent des soins gratuits ou presque, offerts par un pays qui peine à rester la cinquième puissance industrielle
du monde.
Les mêmes me reprochent d’abaisser à 700 000 Euros (vous avez bien lu), le seuil à partir duquel on pourrait utiliser un tout petit peu moins facilement les
conditions hyper-avantageuses des placements sur une assurance vie…
Les mêmes, et j’en ai honte pour eux, vont se bousculer devant les caméras pour vanter les qualités exceptionnelles de Nelson Mandela.
Quand j’ai pointé le comportement de Valérie Pécresse avant-hier sur ce blog, ont déferlé sur mon compte twitter plein de messages dont je vous donne un
exemple :
Ce que @CECKERT56 n'a pas dit hier 450M€ de suppressions de crédits investissement (RFF) &
universités pour
financer dérapage AME/étranger
C'est effectivement ce qu'avait dit Valérie Pécresse.
Toute la journée, ces députés qui stigmatisent les « dépenses de guichet », vont se battre pour défendre les niches fiscales dont Charly n’a pas plus
connu l’existence que celle de la CMU qui aurait peut-être permis à son épouse de voir grandir sa petite fille. Mais ils passeront pour faire acte de repentance par la salle des
quatre colonnes, pour dire leur admiration "sans limite" de l’action "sensationnelle" de Madiba !
Moi, je ne dirai rien de Nelson Mandela.
J’assumerai toute la journée dans l'hémicycle désert, l’augmentation des crédits de l’AME et de l’hébergement d’urgence, tout comme le plafonnement des niches fiscales. En hommage à Nelson Mandela et à la famille de Charly.
Valérie Pécresse fait acte de contrition...
Mon précédent post a fait un peu parler.
Dans l'hémicycle, une de ses collègues a fait "un rappel au règlement", protestant contre mes écrits soit-disant machistes...
J'ai bien relu, je ne trouve aucun propos sexiste dans ma prose, sinon d'avoir signalé que Madame Pécresse est revenue à sa place chercher son sac à main avant de nous quitter, ce qui j'espère n'a indigné personne.
Aucun lecteur ne peut ignorer que le sac à main est un accessoire fréquent chez nos collègues féminines, tout comme la cravatte chez nous autres représentant le sexe masculin, n'est pas un symbole affichant une volonté exagérée de domination machiste.
Mais dans une chronologie ressemblant à celle de mardi, ce mercredi a été pour Madame Pécresse l'occasion d'un acte de repentance salutaire. Elle nous a d'abord rejoint plus tôt, avant la pause du dîner pour une grosse vingtaine de minutes.
Ce premier geste a été suivi de son retour à la reprise de 21h30, ponctué cette fois d'une longue intervention (cette fois plutôt charpentée et habile je dois le reconnaître) pour participer au débat sur la TVA des centres équestres. En tout deux grosses heures de présence jusqu'à environ 23h15, puisque le débat s'est poursuivi sans elle jusqu'à 1h30 du matin.
Comme quoi la transparence des comportements peut contribuer à les faire changer. Et comme quoi, même sans pouvoir absoudre, je peux aussi le signaler avec objectivité.
A l'Assemblée, la technique de Lourdes : "faire des apparitions..."
La présence des députés en séance fait toujours parler. C'est normal. Les gens qui nous observent sont choqués de voir des hémicycles vides, des votes acquis avec des nombres ridicules de votants...
Récit de la seconde partie de la journée d'hier :
Dans l'hémicycle, nous siégeons à partir 15h. De 15h à 16h ont lieu les questions d'actualité, retransmises en direct sur France 3 et LCP jusqu'à 16h. L'hémicycle est bien garni et bruyant, chacun cherche à passer à l'écran, les questions sont formatées, les réponses aussi. Les gens adorent.
A 16 heures, des votes solennels ont lieu, le premier sur le Projet de Loi de Financement de la Sécurité Sociale (PLFSS), le second sur la Loi de Programmation Militaire (LPM). Pour voter, il faut appuyer personnellement sur un bouton situé à sa place nominale, chaque député ne pouvant détenir (par voie électronique), qu'une seule procuration d'un collègue absent. Après de courtes explications de vote (une par groupe), les députés affluent pour voter rapidement.
Cela s'achève vers 17h30, et la séance consacrée à la Loi de Finances Rectificative peut débuter, après une courte suspension de séance de quelques minutes.
S'expriment alors les Ministres pour présenter les choses. Pierre Moscovici et Bernard Cazeneuve décrivent le texte, sans limite de temps de parole.
Comme Rapporteur Général, j'ai droit alors à 10 mn, puis le Président Carrez de la Commission des Finances en fait autant.
Sont ensuite défendues deux motions dites de procédure, destinées à l'opposition. Si elles sont adoptées par le vote qui les suit, le texte est renvoyé.
Tout cela s'achève vers 20h15 sans encombre, les SMS prévenant les troupes du moment du vote, pour s'assurer d'être majoritaire.
Pause dîner, la séance est suspendue jusqu'à 21h30.
A la reprise, la discussion générale (DG) peut commencer pour 1h30. Les intervenants se répartissent, proportionnellement à la taille de leur groupe, des tranches de 5 ou 10 mn. La liste et l'ordre des intervenants sont connus.
Quelques députés socialistes sont là, AUCUN député de droite. A la fin de l'intervention du premier orateur, Valérie Pécresse entre en scène à 21h40. Elle monte à la tribune, égrène quelques généralités, liste les chiffres des déficits et du chômage de plusieurs pays européens... Affligeant... A la fin de son intervention, UN député de droite arrive, inscrit plus loin dans la DG... Il a juste le temps de s'asseoir pour applaudir seul l'ex-ministre du Budget sans avoir entendu le contenu du propos de sa collègue.
Celle-ci quitte la tribune, va prendre son sac à main à sa place, et quitte aussitôt l'hémicycle. Il est 21h50. Elle nous fait un au-revoir gracieux de la main en
clignant des yeux, dépose délicatement un bisou sur sa main et souffle dans notre direction en souriant triomphalement... Au moins, elle assume !
Dix grosses minutes, et Madame la députée pourra se prévaloir de son propos sur les plateaux télé, dans les dîners en ville, sur son blog et avec un peu de chance, être citée dans une dépèche AFP.
Nous ne la reverrons plus de la nuit. Dommage. Elle aurait pu s'opposer à des amendements, donner son point de vue sur la réforme technique de l'Assurance Vie ou encore proposer des modifications budgétaires durant la séance de travail achevée vers 1h30 du matin...
J'appelle cela la technique de Lourdes : "Faire des apparitions".
La technique de Lourdes a un avantage majeur : Comme les pains, les apparitions peuvent se multiplier plusieurs fois par jour, dans des endroits différents ! Bien organisées, les apparitions peuvent donner l'impression d'une activité énorme.
Hélas Valérie Pécresse est loin d'être un cas isolé. Il y en a sur tous les bancs...
L'image des parlementaires se dégrade... Le populisme se répand... A nous de veiller à notre comportement.
Les transmissions sur Internet ou sur LCP des longues séances de travail permettent de plus en plus aux citoyens de trier le bon grain de l'ivraie. Les sites relatant l'activité des députés aussi.
Lourdes, multiplication des pains, bon grain de l'ivraie, gardons quand même la foi... en la démocratie !
On verra cet après-midi et cette nuit si Valérie Pécresse vient racheter ses fautes !