La CADES vivra plus longtemps... C'est nécessaire mais sa disparition aurait fait des heureux !
Le Gouvernement annonce avec force vouloir transférer à la CADES (Caisse d’Amortissement de la Dette Sociale dont j’ai souvent parlé sur ce blog…) une masse importante de dettes : plus de 130 Milliards d’Euros !
Ce paquet est assez hétéroclite : il y aurait des dettes passées, présentes et futures. Curieux amalgame. Pour le passé, les 10 Milliards de dettes des hôpitaux repris par l’Etat et les besoins de financement des caisses de l’ACOSS (Agence centrale des organismes de sécurité sociale). Pour le présent, la dette colossale de la Sécu prévue pour 2020 (plus de 40 Milliards). Mais curieusement, on reporte même les futures dettes de la Sécu dont l’ampleur est pour le moins inconnue à ce stade ! Sont ainsi comptés à la louche les dettes de 2021 et de 2022….
Cette manipulation comptable n’a rien de condamnable pour autant. Il faut la prendre pour ce qu’elle est… Ni plus, ni moins : sanctuariser des dettes et par là même sanctuariser les dépenses servant à les rembourser. Isoler ces opérations dans un organisme doté de recettes (CRDS, un bout de CSG…) calibrées pour que tout soit soldé en… 2033 ! En matière budgétaire, il n’y a pas de miracle. Les déficits sont générateurs de dettes et quel que soit l’endroit où on les range, les dettes doivent se rembourser…
Sans cette nouvelle opération, les dettes du passé auraient été remboursées en 2024 et les recettes de la CADES (autour de 20 Milliards en 2024) seraient devenues entièrement disponibles… Le virus est passé par là et le Gouvernement se donne de l’air, au moins en apparence. En remodelant le planning ET le volume, il arrange la durée pour que les annuités libèrent 2 Milliards de CSG pour les consacrer à la dépendance chaque année. Il n’y a pas là non plus de miracle, pas d’argent « frais », mais de l’argent rendu facile par un endettement augmenté considérablement et rallongé.
J’approuve bien entendu le fléchage de 2 Milliards par an pour la dépendance. J’avais d’ailleurs pour ma part préconisé un petit allongement de la durée de vie de la CADES pour financer immédiatement les besoins recensés dans le rapport Libault.
Mais attention à ne pas se tromper d’analyse : mélanger passé, présent et avenir rend confus la manœuvre. Cette confusion est amplifiée par l’amalgame entre deux sujets distincts : les déficits engendrés par la crise sanitaire et les besoins liés au vieillissement et à la dépendance.
Sans doute une façon de décliner le « en même temps »…
ISF et flat-tax... Le débat réouvert ?
La crise sanitaire et les chamboulements budgétaires qu’elle impose rouvrent des débats que même les gilets jaunes n’avaient qu’à peine écorché…
Les deux grandes premières décisions fiscales du quinquennat Macron ont été la suppression de l’ISF et la mise en en place de la flat-tax sur les revenus du capital.
Plus précisément :
- L’ISF a été de façon stupide, remplacé par l’IFI (Impôt sur la Fortune Immobilière). Par conséquent, l’argent qui dort (assurance-vie, obligations, liquidités…) n’est plus imposé. Ce qui incite à le laisser dormir, contrairement à l'objectif affiché par le Président !
- La mise en place de la flat-tax a fait sauter la plus juste des dispositions fiscales du quinquennat de François Hollande : depuis 2012, les revenus du patrimoine (dividendes, intérêts, plus-values…), étaient assujettis aux mêmes cotisations et impôts que les revenus du travail (salaires…). En supprimant ça, LREM a allégé considérablement l'impôt des fruits du capital.
Ces deux décisions ont fait le bonheur d’une toute petite minorité de français. Au total, ceux-ci ont ainsi évité de payer plus de 5 Milliards d’Euros à l’Etat et à la Sécurité Sociale ! L’utilité économique est loin d’être évidente. L’impact budgétaire est manifeste.
Les éléments de langage diffusés par LREM feraient rire si le sujet n’était pas aussi grave : « les montants en cause seraient faibles et pas à la hauteur des enjeux… ». Quand on supprime l’ISF, l’effet sur l’économie (le PIB est de plus de 2 300 Milliards…) est qualifié de décisif. « En même temps », l’impact sur le budget de l’Etat (300 Milliards…) de la suppression de la même somme serait dérisoire…
Un « monde d’Après » est à construire. Mais reprendre dans celui « d’Avant » les quelques éléments d’équité et de justice existants n’aurait rien de honteux.
Après tout, le virus a sans doute eu la peau de la réforme des retraites et peut-être de celle de l'Assurance chômage. Alors... Président, encore un pas en arrière !