Crédit d'impôts compétitivité emploi : les conditions pour réussir.
Accélérer l'adoption du Crédit d'impôts compétitivité emploi (CICE) et le réaménagement de la TVA n'avait pas ma faveur. Pour plusieurs raisons... Mais le Gouvernement a décidé de faire voter en quelques jours ces deux dispositions par voie d'amendement au Projet de loi de Finances Rectificatives 2012 déjà déposé à l'Assemblée Nationale. Inutile donc de rediscuter du tempo.
L'idée du Crédit d'impôts pour relancer la compétitivité est une excellente idée. Pour deux raisons essentielles :
D'abord -et c'est bassement matérialiste- parce que le budget 2013 n'est en rien affecté. Ensuite -et c'est encore plus important- parce que la question est déconnectée des modes de financement des comptes sociaux, qui relèvent d'une gestion paritaire et posent des questions de principes à traiter avec prudence.
Que le financement d'une partie de ce CICE fasse appel à de la TVA (pour un tiers seulement) à partir du 1° janvier 2014 ne me choque pas outre mesure, tant les autres modes de financement ont soit atteint leurs limites soit des inconvénients conduisant à y renoncer.
Mon inquiétude et mon désir de délais viennent d'autres aspects, qui, sans remettre en cause les grands principes, nécessiteront une grande vigilance et un suivi attentif faute d'avoir pris le temps de les traiter en amont du texte. En fonction du projet d'amendement en ma possession, des questions restent pendantes :
· - Le futur CICE embrasse beaucoup de cibles : Environ 20% des 20 Milliards du CICE iront à l'industrie. C'est peu pour doper la compétitivité. Les autres bénéficiaires sont dans les services, le commerce, la santé ou le secteur non marchand.
· - Certains secteurs économiques sont néanmoins oubliés : Le secteur associatif et le champs de l'économie sociale et solidaire pourraient ne pas être éligible. Une vraie difficulté en terme d'équité, surtout pour un secteur cher à la gauche.
· - Le CICE pourra amplifier des différences dans des secteurs sensibles : L'exemple du secteur médical est emblématique. Les cliniques privées toucheraient le CICE. L'Hôpital public ou associatf n'en bénéficierait pas. C'est inacceptable.
· - Le CICE pourra servir à tout : Certes pour investir, embaucher, former des salariés, développer la recherche ou l'exportation. Mais aussi pour augmenter certaines rémunérations excessives ou des dividendes pas toujours décents.
Jeudi soir, un premier travail avec le Gouvernement a permis de poser les questions, et de trouver des réponses. Ce travail sera poursuivi lundi soir à Matignon. Il sera difficile en si peu de jours (il y a de nombreuses difficultés techniques, constitutionnelles ou d'euro-compatibilité... ), de fabriquer les réponses législatives instantanées à tout. Le Premier Ministre a convenu de légiférer ultérieurement sur les contreparties au CICE surtout si les négociations entre les partenaires sociaux n'aboutissaient pas. Il m'a également assuré que les différences entre secteur privé, associatif ou publics seraient traitées en jouant sur les tarifs pratiqués (secteur médical) ou les taxes sur les salaires (secteur associatif et mutualiste).
J'aurai pour ma part préféré tout examiner en même temps dans une seule loi, en février 2013 comme prévu. L'essentiel sera de veiller à ce que les équilibres évoqués clairement ci-dessus soient tenus. Les députés socialistes y seront très attentifs.
Budget 2013 voté en première lecture, la suite se précise...
Un mois complet de travail intense s'est achevé hier par le vote en première lecture du budget 2013. Des jours (et des nuits) passées à examiner des centaines d'amendements, avec passion et quelques temps forts pas toujours agréables ( article "pigeons", palfonnements des niches outre-mer, amendement "oeuvres d'art", péréquation des fonds de péréquation des collectivités locales...).
C'est le travail législatif habituel : Trancher entre des points de vue différents, sur des sujets souvent techniques, arbitrer entre le point de vue du gouvernement et celui des députés de sa majorité... Des moments de crispation, mais aussi une grande satisfaction d'avoir fait vivre le débat au coeur des décisions structurant le budget de la Nation. En jeu la fiscalité qui met à contribution les citoyens et les entreprises, mais aussi les dépenses de l'Etat que beaucoup trouvent excessives mais que personne ne veut diminuer quand ça touche à son domaine de vie ou de prédilection.
Le tout dans un contexte difficile, tant que l'endettement fait disparaître toute marge de manoeuvre et tant que le contexte international ne donne pas non plus la croissance qui pourrait mécaniquement faire croitre les recettes. Que n'avons nous plus insisté sur la situation laissée en héritage par ceux qui aujourd'hui veulent nous donner des leçons de bonne gestion, de justice fiscale et d'équité sociale.
Si certains attendaient une révolution fiscale plus marquée, ne soyons pas trop modestes sur le travail accompli en quelques mois à peine : remise en place de l'ISF, annulation de l'augmentation de la TVA "Sarkozy", contribution des banques et assurances, rabotage sévère de la déduction des frais financiers des plus grandes entreprises pour le calcul de leur impôt, alignement au barème des dividendes et des produits financiers du capital, mise au barême de certaines plus values mobilières, augmentation des droits de succession des grosses successions, création d'une tranche d'impôt à 45% pour les gros revenus... Si ce n'est pas une révolution, c'est en tout cas une réforme profonde qui nous permet de réduire le déficit comme jamais et d'envisager une diminution inédite de la dette. Un peu de reprise économique et les effets seront rapides.
Se profile la mise en oeuvre du pacte de compétitivité, dans un timing un peu bousculé : je vais dans un quart d'heure à l'Hôtel Matignon pour en affiner le contenu et le calendrier. Le crédit d'impôts emploi et compétitivité serait examiné dans la loi de finances rectificative, déjà en cours d'examen par mes services, qui sera votée comme d'habitude fin Décembre. Quelle assiette, quels taux, quels secteurs éligibles, quelles conditions à respecter, quelles contreparties ? Encore quelques centaines d'amendements à étudier et on pourra passer aux fêtes de fin d'années.
J'espère être "sorti" de cela le 24 décembre : Noël, c'est sacré !
La taxe professionnelle pas vraiment supprimée....
20/11/2012
Une question (technique) au Gouvernemet.
Il y avait longtemps....
Malaise à l'UMP, pas de quoi se réjouir...
Dans un premier temps, le chaos à l'UMP pourrait nous réjouir. Mais bien sûr, le Parti Socialiste -mon parti- a connu lui aussi les affres de l'incertitude, des divisions et des accusations de fraude. Le PS a réussi des primaires citoyennes exemplaires, propres et mobilisatrices. L'UMP apprend la démocratie. Au delà des résultats serrés, des recomptages et du chaos, il faut revenir à l'essentiel.
La droite a fait le choix, en 2002 de se regrouper en un parti unique, mettant fin à la dualité longtemps en vigueur "UDF et RPR". A l'exception de quelques centristes assez isolés, néanmoins alliés traditionnels de la droite, le grand parti unique a présenté une certaine unité pendant 10 ans. D'abord tenu par Jacques Chirac, l'UMP a été prise habilement par Nicolas Sarkozy et n'a pu garder son unité que contrainte par la solidarité obligée au Président issu de ses rangs.
L'explosion qui menace aujourd'hui ce parti est en fait plus profonde que les ambitions présidentielles toujours importantes des deux prétendants. Elle était inscrite dans la dérive droitière du Président Sarkozy : Ministère de l'identité nationale, discours de Dakar puis de Grenoble, populisme permanent, stigmatisation des musulmans, culte de l'argent, exercice du pouvoir solitaire, campagne orientée par Patrick Buisson... Beaucoup d'électeurs de droite ne s'y retrouvaient plus.
Des gaullistes historiques, des "séguinistes", des gens comme Jean Louis Debré et bien d'autres, sont restés solidaires le temps d'un quinquennat, mais ont trouvé en François Fillon une alternative à cette droite décomplexée incarnée par Jean François Copé, plus occupée à chasser sur le terreau du Front National qu'à consolider ou construire un modèle de société ouvert et respectueux des valeurs progressistes portées par la France.
A l'Assemblée Nationale, durant les dernières années de la Présidence Sarkozy, de très nombreux députés de l'UMP cachaient mal leur malaise devant l'évolution de leur parti. Les outrances du chef en place comme la passivité de certains ministres complices, a alimenté de nombreuses conversations, au moins autant que la chronique de leur défaite annoncée.
Les événements de ce vote à la présidence de l'UMP ne sont que les signes d'un virage que la droite hésite à faire. Elle peut se radicaliser et fricoter comme Monsieur Copé avec le Front National. Elle peut aussi retrouver des valeurs plus humanistes.
Finalement, cette hésitation en serait presque rassurante !
Compétitivité : un formidable défi !
Le premier enseignement du rapport Gallois ( à lire intégralement en cliquant ici et en ouvrant
avec Adobe reader) est de confirmer le déclin économique de la France depuis une dizaine d'années. Comme par hasard, la droite a géré notre pays de 2002 à 2012, sans interruption ! Elle devrait
faire preuve d'humilité, faire acte de contrition sinon de repentance, plutôt que de vociférer comme elle le fait en stigmatisant un Président en place depuis 6 mois, son Gouvernement et sa
majorité au Parlement dont l'élection ne date que de quatre petits mois !
La droite n'a pas seulement laissé s'effondrer nos industries. Elle a vidé les caisses de l'Etat, doublé l'endettement du pays, atteint des records de déficit du
commerce extérieur, accru les inégalités sociales et fiscales, abandonné les services publics et particulièrement l'Ecole de la République, remis en cause la solidarité fondant nos régimes de
retraite et de santé, laissé l'Europe perdre la confiance des français faute de projet politique, économique ou social !
La droite voudrait faire de la crise internationale de la cause de tous les maux. Elle oublie que celle ci date de fin 2008, qu'il a fallu attendre fin 2011 pour
voir le gouvernement Fillon prendre des décisions pour revenir à moins de folie libérale en France, et que la réactivité européenne a fait rire le monde entier en multipliant les "sommets de la
dernière chance", annonçant tous les mois le sauvetage définitif d'une union monétaire dont la solidarité "n'a pas fait la preuve de sa fécondité".
Les 22 propositions du rapport sont pour beaucoup d'entre elles consensuelles, et parfois déjà mises en oeuvre ! Quelques unes font débat et c'est bien normal
:
La question de l'étude de la ressource énergétique que constituent les gaz de schiste en est une. Ma modeste formation scientifique m'incite à ne pas fermer trop
vite des pistes de recherche. Il faut avoir confiance en la science et à la capacité de l'homme à la mettre souvent (certes pas toujours) au service du progrès. Ceci bien sûr impose néanmoins
prudence et contrôle. Le rapport Gallois ne va pas plus loin que l'exploration des méthodes d'exploitation. Une maîtrise publique, garante d'indépendance et de sécurité s'impose donc. Le
Gouvernement semble plus fermé. Ne nous privons pas trop vite de possibilités, certes non encore avérées, de trouver des marges d'autonomie sur des ressources donnant le temps à la transition
énergétique qui demeure l'objectif à terme.
La question de la compétitivité-coût est aussi importante, même si elle n'est qu'un des facteurs de compétitivité. Le gouvernement y apporte une réponse dont les
orientations sont bonnes. On nous reproche de reproduire la TVA "Sarkozy" que nous avons supprimée dès notre premier acte budgétaire. C'est faux. D'abord l'ampleur du mouvement est moitié
moindre. Mais surtout, et pardon pour la technicité, le crédit d'impôt que nous mettrons en place, ne se substitue pas à des cotisations patronales comme le faisait la droite ! En conséquence, le
gain pour l'économie des entreprises sera "net d'impôt" (donc supérieur d'environ un tiers de plus in finé. Enfin, le crédit d'impôt sera de 3 fois supérieur au gain de TVA (6 Milliards), grâce
en grande partie à des économies de l'Etat (environ 10 Milliards) et à une fiscalité écologique à venir (plusieurs Milliards).
Il s'agit là en outre d'un vrai plan d'ensemble qui porte aussi sur bien d'autres domaines (enseignement, recherche, fonds propres des entreprises, politiques de
filières, aides à l'exportation...). Le tout sera bien entendu fondé sur la négociation sociale et le travail parlementaire, qui se saisiront chacun pour leurs domaines de compétences de sujets
restant à peaufiner, comme par exemple les champs détaillés de la TVA remodulée et les contreparties au crédit d'impôt pour s'assurer de son bon emploi.
Ce pacte proposé au pays est finalement un formidable défi dont chacun doit prendre conscience. L'absence de politique économique de la droite a provoqué le
décrochage de la France. Sans être "à genoux", notre pays doit s'appuyer sur ses atous qui restent importants. Notre qualité de vie, la qualité de nos infrastructures, notre organisation
solidaire, notre démographie, la force de nos universités et de nos chercheurs, notre place retrouvée en Europe, nous rendent confiants dans un avenir redessiné sans compromettre notre modèle
social.
Reste à faire adhérer tous les acteurs à ce projet, et à chacun de mettre sans dogmatisme son énergie à sa réussite. Quel meilleur service peut-on rendre à notre
jeunesse ?
Hé oui, les inégalités se creusent !
Compte tenu de ces évolutions contrastées le long de l’échelle des niveaux de vie, la plupart des indicateurs montrent une progression des inégalités. Ainsi, l’indice de Gini augmente de 0,290 à 0,299. Le rapport entre la masse des niveaux de vie détenue par les 20 % de personnes les plus aisées et celle détenue par les 20 % les plus modestes s’élève de 4,3 à 4,5 (tableau 1).
En tendance sur moyenne période, la progression des inégalités « par le haut » est nette : entre 1996 et 2010, le niveau de vie moyen des 10 % de personnes les plus aisées a augmenté d’environ 2,1 % par an en moyenne, contre 1,4 % pour le niveau de vie moyen de l’ensemble de la population.
En 2010, les évolutions de salaires expliquent en partie la hausse des inégalités. En effet, en bas de l’échelle des niveaux de vie (au-dessous du 1er décile), le poids des salaires dans le revenu disponible diminue de 3 points, s’établissant à 27 % : d’une part, la proportion de personnes ayant un emploi recule, passant de 23 % à 21 % ; d’autre part, la revalorisation du Smic horaire brut a été limitée en 2010 du fait de la faible inflation en 2009 (en moyenne annuelle, le Smic baisse de 0,5 % en euros constants).
En haut de l’échelle des niveaux de vie (au-dessus du 9e décile), les salaires sont plus dynamiques. En 2010, le salaire moyen des cadres augmente en euros constants, en particulier dans le secteur financier, tandis qu’il diminue pour les ouvriers.
Quant aux revenus du patrimoine, pour la majorité de la population, ils contribuent peu à l’évolution du niveau de vie. Leur poids demeure faible et la majeure partie provient de placements dont les taux diminuent (livrets d’épargne, supports en euros des contrats d’assurance-vie). En revanche, les 10 % de personnes les plus aisées détiennent aussi des placements plus risqués, dont les rendements sont plus élevés en 2010. Les revenus du patrimoine, qui ont un poids important dans leurs ressources (26 % du revenu disponible, contre 7 % en moyenne pour le reste de la population), contribuent positivement à la progression de leur niveau de vie.
source INSEE
Compétitivité ! A quel prix ?
Le débat de la semaine à venir sera centré sur le rapport Gallois, la compétitivité, les décisions du Gouvernement...
A la veille de ce tourbillon médiatique, où tous auront à la bouche le modèle allemand, la compétitivité-coût, la performance industrielle, la place de la France dans le monde... il peut être opportun de revenir à quelques idées simples :
- La France reste la cinquième puissance économique du monde. Elle garde quelques atouts forts :
quelques industries performantes (l'aéronautique, le luxe...), des universités et des chercheurs de pointe, une épargne abondante...
- La droite a géré ce pays depuis 10 ans sans interruption. Durant cette période, les industries de base ont perdu des parts de marché énormes, le
commerce extérieur a atteint un déficit record.
- L'Allemagne fait figure de bon élève de l'Europe, après avoir réduit ses salaires, créé plus de travailleurs pauvres, imposé à ses partenaires européens des cures d'austérité pour payer sa croissance.
A ces discours qui ne font que vanter la performance économique des pays, il faut opposer un discours de vérité simple et réaliste : Autant que le classement de notre pays dans le palmarès économique mondial, il importe de rechercher la meilleure condition de ses habitants. A quoi sert une industrie performante si ce n'est à fournir travail, salaire et progrès social à ceux qui en sont les acteurs ? On m'opposera que le meilleur moyen de partager de la richesse est d'en produire davantage. Sauf que celle existant aujourd'hui n'a jamais été aussi mal partagée : entre salariés et actionnaires comme entre salariés eux-mêmes, jamais la répartition de la valeur ajoutée produite n'a été aussi inégalitaire !
Bien sûr que l'objectif reste de faire de notre pays une puissance industrielle. Mais s'il faut pour cela réduire les salaires, augmenter les prix, renoncer à la protection sociale, pendant que les richesse produites se concentrent entre les mains de quelques privilégiés, il vaut mieux y réfléchir à deux fois.