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Donner sa place au Parlement

19 Janvier 2025 , Rédigé par Christian Eckert

Les propos tenus ici ou là sur le Budget – dont j’affirme ici qu’il est le « juge de paix » de la vie politique des prochains mois – m’étonnent.

D’une part les représentants de LFI annoncent que ne pas voter la censure à l’occasion du budget sera immanquablement le signe du ralliement à la macronie et de la trahison des électeurs de gauche.

D’autre part, les membres du Gouvernement répètent à l’envi que voter contre le budget serait mettre la France dans une situation insupportable. Ils décrivent d’ailleurs des mesures encore floues, incertaines, peu chiffrées et en tout cas non écrites dans un vrai Projet de Loi de Finances.

Les uns comme les autres ne contribuent pas à développer le récent début d’évolution d’une partie de la classe politique. Les premières semaines de François Bayrou (et peut-être d’Éric Lombard) ont vu une partie des forces d’opposition négocier (et parfois obtenir) des éléments de nature à ne pas censurer automatiquement le Gouvernement. N’est-ce pas là le signe d’une gestion apaisée et constructive de l’absence de majorité au Parlement provoquée par le geste ?

Pour autant, la faute collective serait d’aller trop vite dans les postures, sans travailler le fond : Notre constitution réserve au seul Parlement le monopole de l’adoption du Budget. Il faut donc laisser à ce dernier le temps de le recevoir, de l’analyser, de le modifier et, le cas échéant, d’en décider ou pas l’adoption.

Le Gouvernement ne doit pas se considérer comme habilité à annoncer et décider de tout. Et l’opposition, pour être crédible, ne doit pas rejeter par principe une loi de finances dont elle ne connait pas encore le contenu précis.

Une République Parlementaire, avec la séparation des pouvoirs, c’est un exercice encore trop peu pratiqué dans notre pays, trop « accro » aux majorités parlementaires « suppo » du Président.  Il faut donc veiller à donner place au Parlement, qui doit sortir des postures pour trouver les équilibres évitant les blocages.

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Pour les retraites, les dépenses comptent mais aussi les recettes...

17 Janvier 2025 , Rédigé par Christian Eckert

Peu importe grâce à qui, mais le dossier des retraites reprend force et vigueur et c’est tant mieux. Entre la tentative avortée mal conduite par monsieur Delevoye et le passage en force contre les français de Madame Borne, les injustices comme les besoins de financement se multiplient.

Una analyse reprenant des principes simples me parait nécessaire et je m’y risque avec humilité.

D’habitude, lorsque les finances d’un secteur dérivent, on décide de jouer sur les deux volets pour améliorer les comptes : les recettes et les dépenses. Curieusement, à quelques exceptions près, la plupart des propos entendus se focalisent sur les dépenses. Il y aurait pourtant beaucoup à réfléchir sur les recettes !

Trois remarques donc sur les recettes :

  • Les exonérations de cotisations sociales sont « légions » et se sont beaucoup développées dans les dernières années : qui se souvient que le CICE (peu importe sa légitimité) n’a pas été supprimé par le Président Macron, mais transformé en allègement de cotisations sociales (20 Milliards par an quand même…). Qui se souvent qu’après la crise des gilets jaunes, Monsieur Darmanin a fait supprimer des cotisations salariales sans les compenser au budget de la Sécurité Sociale (quelques Milliards aussi) !

 

  • Les nombreuses exonérations de cotisations, instaurées au fil du temps par presque tous les gouvernements, devraient être compensées au budget de la Sécurité Sociale par l’État qui les a décidées. Ces reversements existent, mais leur calcul relève à la fois de l’exploit et de l’escroquerie. J’ai connu à Bercy leur évolution et leur difficile indexation, parfois des dizaines d’années après leur création et c'est complexe. Je confesse pudiquement que ces montants (très élevés) constituaient plus « une variable d’ajustement du budget de L’État que de celui de la Sécurité Sociale ». Il est vital que la Cour des Comptes analyse ce point dans sa « mission flash ».

 

  • Enfin sur le niveau des cotisations elle-même, on doit réfléchir à leurs taux, sachant qu’ils varient suivant le niveau et la nature des revenus. Concernant les salaires, le dépassement de certains plafonds entraine des modulations de cotisations dont les effets restent – c’est un euphémisme – obscurs. Concernant les revenus du capital, la confusion entre l’impôt et les cotisations instaurée par le Président actuel permet toutes les optimisations du monde. Il faut savoir que les dirigeants de société gagnent beaucoup en se payant en dividendes plutôt qu’en sa versant un salaire.
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Trois remarques aussi sur les dépenses :

  • L’allongement de l’âge dit « pivot » est le péché originel de la dernière réforme : une personne qui a fait de longues études et a commencé à travailler tard n’a pas été impacté par le report de l’âge légal. Le nombre d’annuité de cotisation nécessaire été déjà un frein à son départ plus tôt. Bien que les « carrières longues » (acquis de la gauche) ont été quasiment préservées, la réforme a donc pénalisé principalement les salariés moins formés, par nature souvent plus modestes. Au lieu de l’âge, le critère des annuités ou des trimestres cotisés doit être le principal point d’appui du droit au départ.

 

  • Évidemment le cas des femmes doit faire l’objet d’une attention particulière. Celui des carrières hachées aussi. C’est une solidarité nécessaire car la maternité, l’interruption d’activité professionnelle pour s’occuper des enfants comme le travail à temps partiel sont souvent des caractéristiques des carrières féminines. S’appuiyer sur les trimestres cotisés nécessitera d’accorder à des mères de familles des bonus tant sur le droit au départ que sur le calcul des montants de la retraite.

 

  • Tenir compte de la pénibilité, souvent évoquée mais peu pratiquée, est une évidence lorsqu’on regarde les durées de vie des membres des différentes catégorie professionnelles. Les critères votés en 2014 se sont heurtés à l’opposition frontale du MEDEF et le Président Macron les a enterrés ensuite. Aujourd’hui, il semble que la nature de l’activité et ses contrainte redeviennent d’actualité et l’occasion est à saisir par exemple pour le travail posté ou les conditions de travail difficiles.

 

Le dossier est à l’évidence complexe au vu de la diversité des situations. Il est également essentiel par les volumes financiers mis en jeu. Il ne faut rien s’interdire, mais opposer les situations (régimes spéciaux, privé-public…) ne servira pas la cause et bloquera les volontés de progrès qui se dessinent. Gommer au mieux les injustices peut redonner crédibilité et confiance aux acteurs publics, qui en ont tellement perdu.

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