Réserve Parlementaire : Questions réponses ....
La gestion de la réserve parlementaire, son existence même, font l'objet de nombreux commentaires... A l'Assemblée Nationale, c'est le Rapporteur Général de la Commission des Finances qui en assure la gestion. Plutôt que d’entretenir des phantasmes sur le sujet, j’ai décidé d’en communiquer les modalités. L’opacité entretenue jusqu’alors doit cesser.
De quoi s'agit-il ? :
Tous les ans, lors du vote du budget, par voie d'amendement, le Rapporteur Général propose à l'Assemblée d'inscrire, sur différentes lignes budgétaires, une somme globale dont le Gouvernement lui laisse traditionnellement la libre utilisation. Cette somme était en 2012 de 89,5 Millions d'Euros. C'est appelé la "Réserve Parlementaire". Elle sert aux députés à attribuer des aides financières aux projets des collectivités territoriales ou des associations. Le même dispositif existe au Sénat.
Comment se répartissaient ces sommes ? :
Le Rapporteur Général propose l'affectation de ces crédits à des subventions, sur la demande des députés. Concrètement, il demande aux députés de lui transmettre leurs demandes. Jusqu'en 2012, c'est le Rapporteur Général qui décidait seul d'honorer ou non les demandes des députés. L'usage était de laisser au Rapporteur (issu de la majorité), le traitement des demandes des députés de la majorité, et au Président de la Commission des Finances (issu de l'opposition) de gérer celles de ses collègues opposants. Cette répartition intervenait après que ces deux députés se soient accordés sur la part des uns et des autres.
Quelle était la répartition jusqu'en 2012 ? :
L'habitude, non écrite mais qui m'a été confirmée par tous les acteurs qui m'ont précédé, était de donner à la majorité une part très supérieure à celle de l'opposition, sans rapport avec la proportionnalité des groupes à l'Assemblée. Ainsi, un membre de la majorité se voyait attribuer une somme environ 5 à 6 fois supérieure en moyenne à celle d'un membre de l'opposition. Hormis le Rapporteur pour tous les députés et le Président de la Commission des Finances pour les députés de l'opposition, personne n'avait connaissance des montants attribués.
Dans les groupes, l'égalité était-elle de mise ? :
Je ne dispose d'aucune archive sur le sujet. Les indications que j'ai pu recueillir oralement indiquent que des différences de traitement très importantes étaient courantes entre les députés, en plus de celles déjà évoquées entre majoritaires et opposants. Anciens députés, membres de la Commission des finances, personnalités exerçant des fonctions au sein de l'Assemblée, anciens Ministres, des pratiques très discriminantes étaient en vigueur, entretenues par une opacité totale. La presse l'évoque au travers d'exemples concrets jusque-là non démentis.
Comment les subventions sont-elles versées ? :
Le Rapporteur transmet en tout début d'années aux Ministères concernés le détail des demandes qu'il a décidé d'honorer pour chaque député. Il en informe simultanément le député en lui précisant les documents nécessaires (délibération, plan de financement, devis...) que le bénéficiaire potentiel devra transmettre au Ministère pour compléter le dossier. Le Ministère notifie après vérification la subvention au bénéficiaire par arrêté, et la subvention est versée ensuite par l'intermédiaire du Trésor Public dans les règles budgétaires habituelles. Pour les communes, elles figurent évidemment dans les budgets et les comptes administratifs.
A qui et dans quelles proportions les subventions sont-elles destinées ? :
En règle générale, elles sont destinées aux communes et seulement pour leurs investissements. Elles sont limitées à 50% de l'opération et doivent respecter comme toujours le plafond global de 80% d'aides publiques cumulées. Ces aides dépendent du Ministère de l'Intérieur et concernent plus de 75% des montants en jeu. De plus en plus, les députés souhaitent soutenir des associations. Celles-ci doivent elles aussi remplir un dossier spécifique traité alors par le Ministère concerné (Sports, Culture, Affaires Sociales...). L'objet des subventions est alors identifié pour des actions précises (acquisition de matériel, organisation de manifestations ou d'actions...). On encadre toutes les aides entre 100 000 Euros maximum et 1 000 Euros minimum.
Y -t-il des cas particuliers ? :
Oui, après accord du Président de la commission des finances et du rapporteur général, des aides financières peuvent être attribuées à des organismes d’intérêt national. La réserve parlementaire est ainsi venue appuyer des organisations caritatives, des fondations, des organismes de recherche…
Fallait-il maintenir la Réserve Parlementaire ? :
Nous avons débattu et hésité. Un vote précis a eu lieu au sein du Groupe majoritaire. Nous avons décidé de maintenir la "Réserve" pour que les députés puissent, comme les Conseillers Généraux ou Régionaux, avoir une existence locale en terme d'appuis à des dossiers précis. Le parlementaire trouve ainsi une assise locale, et peut soutenir des projets, le plus souvent pour des petites communes, dont les moyens sont limités.
La nouvelle majoritéa-t-elle rétabli l’égalité ? :
Le montant global pour 2013 àl’Assemblée Nationale est identique àcelui de 2012. Pour autant, de nombreux changement ont été décidés, sous l’impulsion du Président Bartolone notamment : Majorité et opposition sont ainsi traitées de la même façon. Chaque groupe politique se voit globalement doté d’une somme égale à 130 000 Euros par député affilié à son groupe. Le Président de chaque groupe transmet alors les demandes individuelles des députés de son groupe au rapporteur général pour ceux de la majorité et au Président de la commission des finances pour ceux de l’opposition. Chaque groupe gère donc sa répartition à l’interne. Près de 90% de la réserve est ainsi géré proportionnellement entre les groupes, le rapporteur général conservant un reliquat pour assurer les reports d’une année sur l’autre, les dossiers arrivant en cours d’année, les opérations de caractère national évoquées plus haut, les députés non-inscrits….
Comment les groupes répartissent-ils la dotation entre leurs membres ? :
Ils le font sous la responsabilité de leur Président. Le groupe socialiste a ainsi souhaité maintenir l’égalité entre ses membres, à quelques (très rares) exceptions près. D’autres groupes en ont décidé autrement et j’ai évidemment suivi leurs propositions.
Pourquoi y a-t-il des exceptions ? :
Lors de nos débats internes, bien des sujets ont été évoqués… Les députés des villes souhaitaient soutenir des associations en priorité. Attribuer 20 000 Euros à la ville de Paris n’a bien sûr pas de sens. Les députés des circonscriptions très rurales ont parfois des centaines de petites communes. Ainsi, un coup de pouce a été donné par exemple dans un département n’ayant qu’un seul député. Certains députés souhaitaient tenir compte de la pauvreté des territoires ou de leurs habitants. Trop complexe, ce critère n’a pas été retenu. D’autres proposaient de tenir compte de l’activité du parlementaire. Le rapporteur général sur le reliquat, peut donc majorer la réserve des Présidents de commission, rapporteur général, Président de l’Assemblée, questeurs, Vice-Présidents… qui sont amenés à rester parisiens durant presque toute la semaine, à la différence de leurs collègues plus disponibles en circonscription. Cette majoration, pour les députés de sa majorité, est fonction du poste occupé et reste de l’ordre d’un doublement, bien loin des Millions d’Euros évoqués dans le passé.
Y aura-il transparence ? :
Chaque député décidera de la publication ou non de l’utilisation de sa réserve. Pour ma part, je l’ai toujours fait. En fin d’exercice, je produirai un état par Ministère, par département, dans les limites de ma connaissance. Certains dossiers sont modifiés en cours de route, d’autres sont décalés d’une année à l’autre, certaines subventions sont refusées pour des dossiers incomplets… Le nombre total de dossiers enregistrés pour 2013 est de l’ordre de 7 500.
Conscient de la difficulté de l’exercice, j’ai souhaité produire ces principes qui représentent un progrès considérable dans l’équité et la transparence. Les règles sont désormais connues et assumées. La Réserve Parlementaire n’est désormais plus secrète. Elle obéit aux règles de la comptabilité publique et sert à appuyer des actions locales identifiées et controlées.